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Lettres du Supérieur Général de la Fraternité Saint-Pie X

 

Fraternité Sacerdotale Saint Pie X

DE L’ŒCUMÉNISME
À
L’APOSTASIE SILENCIEUSE

25 ans de Pontificat
Menzingen 2004


Argument

1. Le 25ème anniversaire de l’élection de Jean-Paul II est l’occasion de réfléchir sur l’orientation fondamentale que le Pape a donnée à son pontificat. Dans la suite du concile Vatican II, il a voulu le placer sous le signe de l’unité : « La restauration de l’unité de tous les chrétiens était l’un des buts principaux du IIème concile du Vatican (cf. UR n° 1) et, dès mon élection, je me suis engagé formellement à promouvoir l’exécution de ses normes et de ses orientations, considérant que c’était là pour moi un devoir primordial 1 » Cette “restauration de l’unité des chrétiens” marquait, selon Jean-Paul II, un pas vers une unité plus grande, celle de la famille humaine tout entière : « L’unité des chrétiens est ouverte sur une unité toujours plus vaste, celle de l’humanité tout entière.2 »

2. En raison de ce choix fondamental,

­          Jean-Paul II a estimé devoir « reprendre en main cette “magna charta” conciliaire qu’est la constitution dogmatique Lumen gentium3 » laquelle définit l’Eglise comme un « sacrement, c’est-à-dire à la fois le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain.4 » Cette “reprise en main” était faite en vue de « réaliser toujours mieux cette communion vitale dans le Christ de tous ceux qui croient et espèrent en lui, mais également en vue de contribuer à une plus ample et plus forte unité de la famille humaine tout entière5»;

­          Jean-Paul II a consacré l’essentiel de son pontificat à la poursuite de cette unité, multipliant rencontres interreligieuses, repentances et gestes œcuméniques. Ce fut également la principale raison de ses voyages : « Ils ont permis d’atteindre les Eglises particulières dans tous les continents, en portant une attention soutenue au développement des relations œcuméniques avec les chrétiens des différentes Confessions6 »;

­          Jean-Paul II a donné l’œcuménisme pour trait caractéristique du Jubilé de l’an 2000.7

En toute vérité, donc, « on peut dire que toute l’activité des Eglises locales et du Siège apostolique ont eu ces dernières années un souffle œcuménique.8» Désormais, vingt-cinq ans ont passé, le Jubilé s’en est allé : l’heure des bilans a sonné.

3. Longtemps, Jean-Paul II a cru que son pontificat serait un nouvel Avent9 permettant à « l’aube de ce nouveau millénaire [de] se lever sur une Eglise qui a retrouvé sa pleine unité.10 » Alors se serait réalisé le « rêve » du Pape : « Tous les peuples du monde en marche, de différents lieux de la Terre, pour se réunir auprès du Dieu unique comme une seule famille.11 » La réalité est tout autre : « Le temps que nous vivons apparaît comme une époque d’égarement [où] beaucoup d’hommes et de femmes semblent désorientés.12» Règne par exemple sur l’Europe une « sorte d’agnosticisme pratique et d’indifférentisme religieux », au point que « la culture européenne donne l’impression d’une “apostasie silencieuse.”13 » L’œcuménisme n’est pas étranger à cette situation. L’analyse de la pensée de Jean-Paul II (1ère partie) nous fera constater, non sans une profonde tristesse, que la pratique œcuménique est héritée d’une pensée étrangère à la doctrine catholique (2ème partie) et mène à l’“apostasie silencieuse” (3ème partie).


Chapitre I


L’unité du genre humain
et le dialogue interreligieux

Le Christ, uni à chaque homme

4. A la base de la conception du Pape se trouve l’affirmation selon laquelle « Jésus-Christ (qui) “s’est uni d’une certaine manière à tous les hommes” (Gaudium et spes, n° 22), même si ceux-ci n’en sont pas conscients.14» Jean-Paul II explique en effet que la Rédemption apportée par le Christ est universelle non seulement en ce sens qu’elle est surabondante pour le genre humain tout entier et qu’elle est proposée à chacun de ses membres en particulier, mais surtout parce qu’elle est appliquée de fait à tous les hommes : si donc, d’un côté, « dans le Christ, la religion n’est plus une “recherche de Dieu comme à tâtons” (Act 17, 27), mais une réponse de la foi à Dieu qui se révèle […], réponse rendue possible par cet Homme unique […] en qui tout homme est rendu capable de répondre à Dieu », de l’autre, le Pape ajoute « [qu’]en cet Homme, la création entière répond à Dieu.15 » En effet, « chacun a été inclus dans le mystère de la Rédemption, et JésusChrist s’est uni à chacun, pour toujours, à travers ce mystère. […] C’est cela, l’homme dans toute la plénitude du mystère dont il est devenu participant en Jésus-Christ et dont devient participant chacun des quatre milliards d’hommes vivant sur notre planète, dès l’instant de sa conception.16 » De la sorte, « dans l’Esprit-Saint, chaque personne et chaque peuple sont devenus, par la croix et la résurrection du Christ, des enfants de Dieu, des participants de la nature divine et des héritiers de la vie éternelle.17»

Le congrès d’Assise

5. Cet universalisme de la Rédemption trouve son application immédiate dans la manière dont Jean-Paul II pratique les relations entre l’Eglise catholique et les autres religions. En effet, si l’ordre de l’unité précédemment décrit « est celui qui remonte à la création et à la rédemption et s’il est donc, en ce sens, “divin”, ces différences et ces divergences [citées plus haut], même religieuses, remontent plutôt à un “fait humain”18 » et doivent donc « être dépassées dans le progrès vers la réalisation du grandiose dessein d’unité qui préside à la création.19 » D’où les réunions interreligieuses telles que celle d’Assise, le 27 octobre 1986, en laquelle le Pape a voulu déceler « de manière visible, l’unité cachée mais radicale que le Verbe divin […] a établie entre les hommes et les femmes de ce monde. 20 » Par de tels gestes, le Pape entend faire proclamer à l’Eglise que « le Christ est la réalisation de l’aspiration de toutes les religions du monde et, par cela même, il en est l’aboutissement unique et définitif.21»


L’Eglise du Christ et l’Œcuménisme

L’unique Eglise du Christ

6. Un double ordre : unité divine demeurant inviolée, et divisions historiques qui ne relèvent que de l’humain ; telle est encore la grille appliquée à l’Eglise, considérée comme communion. Jean-Paul II distingue en effet l’Eglise du Christ, réalité divine, des différentes Eglises, fruits des “divisions humaines”22. L’Eglise du Christ, aux contours assez mal définis du fait qu’elle déborde des limites visibles de l’Eglise catholique23 , est une réalité intérieure24. Elle rassemble pour le moins l’ensemble des chrétiens25, quelle que soit leur appartenance ecclésiale : tous sont « disciples du Christ26», « dans une appartenance commune au Christ27» ; ils « sont un parce que, dans l’Esprit, ils sont dans la communion du Fils et, en lui, dans sa communion avec le Père.28» L’Eglise du Christ est donc communion des saints, par delà les divisions : « L’Eglise est Communion des saints.29» En effet, « la communion en laquelle les chrétiens croient et espèrent est, en sa réalité la plus profonde, leur unité avec le Père par le Christ et dans le Saint-Esprit. Depuis la Pentecôte, elle est donnée et reçue dans l’Eglise, communion des saints.30 »

Les divisions ecclésiales

7. D’après Jean-Paul II, les divisions ecclésiales survenues au cours de l’histoire n’auraient pas affecté l’Eglise du Christ, autrement dit auraient laissé inviolée l’unité radicale des chrétiens entre eux : « Par la grâce de Dieu, ce qui appartient à la structure de l’Eglise du Christ n’a pourtant pas été détruit, ni la communion qui demeure avec les autres Eglises et Communautés ecclésiales.31» Ces divisions sont en effet d’un autre ordre ; elles ne concernent que la manifestation de la communion des saints, ce qui la rend visible : les traditionnels liens de la profession de foi, des sacrements et de la communion hiérarchique. En refusant l’un ou l’autre de ces liens, les Eglises séparées ne portent atteinte qu’à la communion visible avec l’Eglise catholique, et encore seulement de manière partielle : cette dernière communion est capable de plus ou de moins, selon qu’un plus ou moins grand nombre de liens auront été sauvegardés. On parlera alors de communion imparfaite entre les Eglises séparées et l’Eglise catholique, la communion de tous dans l’unique Eglise du Christ demeurant sauve32. Le terme d’ “Eglises-sœurs” sera souvent utilisé33.

8. Selon cette conception, ce qui unit entre elles les différentes Eglises chrétiennes est plus grand que ce qui les sépare34:

« L’espace spirituel commun l’emporte sur bien des barrières confessionnelles qui nous séparent encore les uns des autres.35» Cet espace spirituel, voilà l’Eglise du Christ. Si celle-ci ne « subsiste 36» « en un unique sujet37 » que dans l’Eglise catholique, elle n’en garde pas moins une « présence active » dans les Communautés séparées en raison des « éléments de sanctification et de vérité38 » qui y sont présents. C’est ce prétendu espace spirituel commun que Jean-Paul II a voulu sceller par la publication d’un martyrologe commun aux Eglises : « L’œcuménisme des saints, des martyrs, est peut-être celui qui convainc le plus. La voix de la communio sanctorum est plus forte que celle des fauteurs de division.39 »

Ni absorption ni fusion, mais don réciproque

9. Dès lors, « le but ultime du mouvement œcuménique » n’est que « le rétablissement de la pleine unité visible de tous les baptisés.40» Une telle unité ne se réalisera plus par l’“œcuménisme de retour”41: « Nous le rejetons comme méthode de recherche d’unité. […] L’action pastorale de l’Eglise catholique tant latine qu’orientale ne tend plus à faire passer les fidèles d’une Eglise à l’autre.42 » Ce serait en effet oublier deux choses :

­          Ces divisions, que le concile Vatican II analyse comme des manquements à la charité43, sont imputables de part et d’autre : « Evoquant la division des chrétiens, le décret sur l’œcuménisme n’ignore pas “la faute des hommes de l’une et l’autre partie” , en reconnaissant que la responsabilité ne peut être attribuée uniquement “qu’aux autres (UR, 3).”44»

­          L’œcuménisme est aussi « échange de dons45» entre les Eglises : « L’échange des dons entre les Eglises, dans leur complémentarité rend féconde la communion.46»

C’est pourquoi l’unité souhaitée par Jean-Paul II « n’est pas absorption ni même fusion.47 » Appliquant ce principe aux relations entre l’Eglise catholique et les orthodoxes, le Pape développe : « Les deux Eglises-sœurs d’Orient et d’Occident comprennent aujourd’hui que sans une écoute réciproque des raisons profondes qui sous-tendent en chacune d’elles la compréhension de ce qui les caractérise, sans un don réciproque des trésors du génie dont chacune est porteuse, l’Eglise du Christ ne peut manifester la pleine maturité de cette forme qu’elle a reçue au début, dans le Cénacle.48 »


La recomposition de l’unité visible

10. « De même que dans la famille les éventuelles dissensions doivent être dépassées par la recomposition de l’unité, c’est ainsi que l’on doit faire dans la famille plus vaste de la communauté chrétienne tout entière.49» Dépasser les dissensions humaines par la recomposition de l’unité visible, telle est la méthodologie du Pape. Il faudra l’appliquer dans les trois liens traditionnels de la profession de foi, des sacrements et de la communion hiérarchique, du fait que ce sont eux qui constituent la visibilité de l’unité.

L’unité de sacrements

11. On sait comment Paul VI s’y est employé en matière de sacrements : dans les réformes liturgiques successives qui ont appliqué les décrets conciliaires, « l’Eglise a été guidée (…) par le désir de tout faire pour faciliter à nos frères séparés le chemin de l’union, en écartant toute pierre qui pourrait constituer ne serait-ce que l’ombre d’un risque d’achoppement ou de déplaisir.50 »

12. L’obstacle d’une liturgie catholique trop expressive du dogme ainsi écarté, il restait à dépasser la difficulté posée par les liturgies des communautés séparées. La réforme fit alors place à la reconnaissance : bien qu’elle ne contienne pas les paroles consécratoires, l’anaphore assyrienne (nestorienne) d’Addaï et Mari fut décrétée valide en un document expressément approuvé par Jean-Paul II 51.

L’unité dans la profession de foi

13. En matière de foi, Jean-Paul II estime que, bien souvent, « les polémiques et les controverses intolérantes ont transformé en affirmations incompatibles ce qui était en fait le résultat de deux regards scrutant la même réalité, mais de deux points de vue différents. Il faut trouver aujourd’hui la formule qui, saisissant cette réalité intégralement, permette de dépasser les lectures partielles et d’éliminer les interprétations erronées.52 » Cela réclame une certaine latitude par rapport aux formules dogmatiques jusque là employées par l’Eglise. On recourra donc au relativisme historique, afin de faire dépendre les formules dogmatiques de leur époque : « Les vérités que l’Eglise entend réellement enseigner par ses formules dogmatiques sont sans doute distinctes des conceptions changeantes propres à une époque déterminée ; mais il n’est pas exclu qu’elles soient éventuellement formulées, même par le Magistère, en des termes qui portent des traces de telles conceptions.53 »

14. Deux applications de ces principes sont souvent citées. Dans le cas de l’hérésie nestorienne, Jean-Paul II estime que « les divisions qui se sont produites étaient dues dans une large mesure à des malentendus.54» En effet, si le principe qui affirme que « en premier lieu, devant des formulations doctrinales qui se séparent des formules en usage dans la communauté à laquelle on appartient, il convient manifestement de discerner si les paroles ne recouvrent pas un contenu identique55 » est clair, l’application qui en est faite est détournée. C’est ainsi que la reconnaissance de foi christologique de l’Eglise assyrienne d’Orient, sans que lui ait été réclamée l’adhésion à la formule d’Ephèse selon laquelle Marie est Mère de Dieu, fait fi des condamnations antérieures, sans tenir compte de leur aspect infaillible56. Plus caractéristique encore est la déclaration commune avec la Fédération luthérienne mondiale. Son souci ne fut pas de dire la foi et d’écarter l’erreur, mais seulement de trouver une formulation apte à échapper aux anathèmes du concile de Trente : « Cette déclaration commune est portée par la conviction que le dépassement des condamnations et des questions jusqu’alors controversées ne signifie pas que les séparations et les condamnations soient prises à la légère ou que le passé de chacune de nos traditions ecclésiales soit désavoué. Elle est cependant portée par la conviction que de nouvelles appréciations adviennent dans l’histoire de nos Eglises.57 » D’un mot bien simple, le cardinal Kasper commentera cette déclaration : « Là où nous avions vu au premier abord une contradiction, nous pouvons voir une position complémentaire.58 »

La communion hiérarchique

15. Quant au ministère pétrinien, les souhaits pontificaux sont connus : trouver, de concert avec les pasteurs et théologiens des différentes Eglises, « les formes dans lesquelles ce ministère pourra réaliser un service d’amour reconnu par les uns et par les autres.59 » On introduira alors le régulateur de la necessitas Ecclesiæ60, comprise aujourd’hui comme réalisation de l’unité des chrétiens, pour atténuer ce qui, dans l’exercice du ministère pétrinien, pourrait être obstacle à l’œcuménisme.

16. Selon le cardinal Kasper, cette démarche ne suffit pas. Il faut encore dépasser les obstacles présents dans les communautés séparées, par exemple l’invalidité décrétée des ordinations anglicanes 61. La piste qu’il propose pour cela est une redéfinition du concept de succession apostolique, non plus « dans le sens d’une chaîne historique d’imposition des mains remontant à travers les siècles à un apôtre – ce serait une vision très mécanique et individualiste » mais comme « participation collégiale dans un collège qui, comme un tout, remonte aux apôtres par le partage de la même foi apostolique et par la même mission apostolique.62 »



1. - Jean-Paul II, Allocution au secrétariat pour l’unité des chrétiens du 18/11/ 1978, La documentation catholique (DC) n°1753 du 03/12/1978 p. 1017.

2. - Jean-Paul II, Angélus du 17/01/1982, DC n°1823 du 07/02/1982, p. 144.

3. - Jean-Paul II, 1er message au monde du 17/10/1978, DC n°1751 du 05/11/ 1978, p. 902-903.

4. - Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. Lumen Gentium, n°1.

5. - Jean-Paul II, 1er message au monde du 17/10/1978, DC n°1751 du 05/11/ 1978, p. 903.

6. - Jean-Paul II, Tertio millennio adveniente, n°24. Cf. Jean-Paul II, Ut unum sint, n°42 : « Les célébrations œcuméniques sont parmi les événements les plus importants de mes voyages apostoliques dans les différentes parties du monde. »

7. - Jean-Paul II, Homélie à l’ouverture de la Porte Sainte à Saint-Paul-hors-les-Murs du 18/01/2000, DC n°2219 du 06/02/2000, p. 106 : « La Semaine de Prière pour l’unité des chrétiens commence aujourd’hui à Rome avec la célébration qui nous voit réunis. J’ai voulu qu’elle coïncide avec l’ouverture de la Porte Sainte dans cette basilique consacrée à l’Apôtre des nations, pour souligner la dimension œcuménique qui doit caractériser l’Année jubilaire 2000. »

8. - Jean-Paul II, Tertio millennio adveniente, n°34.

9. - Jean-Paul II, Redemptor hominis, n°1.

10. - Jean-Paul II, Homélie prononcée en présence du Patriarche œcuménique de Constantinople Dimitrios 1er le 29/11/1979 à Istanbul, DC n°1776 du 16/12/ 1979, p. 1056.

11. - Jean-Paul II, Message pour la XV° Rencontre internationale de prière pour la paix, DC n°2255 du 07/10/2001, p. 818.

12. - Jean-Paul II, Ecclesia in Europa, n°7, DC n°2296 du 20/07/2003, p. 670-671.

13. - Jean-Paul II, Ecclesia in Europa, n°7 & 9, DC n°2296 du 20/07/2003, p. 671672.

14. - Jean-Paul II, La situation du monde et l’esprit d’Assise, Discours aux cardinaux et à la Curie du 22/12/1986, DC n°1933 du 01/02/1987, p. 134.

15. - Jean-Paul II, Tertio millennio adveniente, n°6.

16. - Jean-Paul II, Redemptor hominis n°13.

17. - Jean-Paul II, Message aux peuples d’Asie du 21/02/1981, DC n°1804 du 15/03/1981, p. 281.

18. - Jean-Paul II, La situation du monde et l’esprit d’Assise, discours aux cardinaux et à la Curie du 22/12/1986, DC n°1933 du 01/02/1987, p. 134.

19. - Jean-Paul II, ibid.

20. - Jean-Paul II, ibid., p. 133.

21. - Jean-Paul II, Tertio millennio adveniente, n°6.

22. - Jean-Paul II, Ut unum sint n°42 : « L’usage tend à substituer aujourd’hui des termes plus aptes à exprimer la profondeur de la communion - liée au caractère baptismal -, que l’Esprit nourrit malgré les ruptures historiques et canoniques. »

23. - Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redintegratio, n°3 : « Parmi les éléments ou les biens par l’ensemble desquels l’Eglise se construit et est vivifiée, plusieurs et même beaucoup, et de grande valeur, peuvent exister en dehors des limites visibles de l’Eglise catholique. […] Tout cela, qui provient du Christ et conduit à lui, appartient de droit à l’unique Eglise du Christ. » C’est en raison de cette affirmation que LG n°8 dit de l’Eglise du Christ qu’elle “subsiste dans”  l’Eglise catholique, et non qu’elle “est” l’Eglise catholique. Cf. commentaire du cardinal Ratzinger, L’ecclésiologie de la Constitution conciliaire Lumen Gentium, conférence du 27/02/2000, DC n°2223 du 02/04/2000, p. 310-311 : « Par cette expression, le Concile se différencie de la formule de Pie XII qui avait dit dans son Encyclique Mystici Corporis : l’Eglise catholique “est” (est, en latin) cependant l’unique corps mystique du Christ. […] La différence entre “subsistit” et “est” renferme le drame de la division ecclésiale. Bien que l’Eglise soit seulement une et subsiste en un unique sujet, des réalités ecclésiales existent en dehors de ce sujet : de véritables Eglises locales et diverses Communautés ecclésiales. »

24. - Cette affirmation découle directement de la manière dont Lumen Gentium (n°7 et 8) présente l’Eglise. Jusque là, le Magistère la tirait de l’analogie paulinienne selon laquelle l’Eglise est le corps du Christ ; corps, donc visible : « Parce qu’elle est un corps, l’Eglise est visible à nos regards. » (Léon XIII, Satis cognitum, DzH 3300). Or le concile refuse de faire ce lien : il traite séparément de l’Eglise corps du Christ (LG, n°7) et de la visibilité de l’Eglise catholique (LG, n°8). C’est laisser entendre que l’Eglise corps du Christ [l’Eglise du Christ] n’est pas de soi quelque chose de visible. Certes, LG n°8 affirme l’union nécessaire de l’Eglise du Christ et de l’Eglise organique : « La société douée d’organes hiérarchiques [Eglise catholique] et le Corps mystique du Christ [Eglise du Christ], l’assemblée visible [Eglise catholique] et la communauté spirituelle [Eglise du Christ], l’Eglise de la terre [Eglise catholique] et l’Eglise si riche en biens célestes [Eglise du Christ], ne doivent pas être considérés comme deux réalités, mais forment une seule réalité complexe. » Mais cette affirmation n’est pas suffisante : l’union de deux choses distinctes – l’Eglise du Christ et l’Eglise organique – n’est pas l’affirmation de l’unité propre à l’Eglise. Cette unité est au contraire refusée, lorsqu’il est dit de l’Eglise du Christ qu’elle « subsiste dans l’Eglise catholique » : le rapport de contenant à contenu n’est pas celui de l’identité, surtout lorsqu’il est affirmé que l’Eglise du Christ se rend présente de manière agissante ailleurs que dans ce contenu parfait qu’est l’Eglise catholique. En conséquence de cette affirmation et dans la suite de LG n°15, Jean-Paul II affirme souvent que le baptisé, quelle que soit son appartenance ecclésiale est et demeure uni au Christ, incorporé à lui. Cette théorie affirmant l’intériorité de l’Eglise du Christ est tellement répandue que des cardinaux aussi différents que J. Ratzinger et W. Kasper la rappellent comme une évidence : « “L’Eglise se réveille dans les âmes”  : Cette phrase de Guardini avait été longuement mûrie. En effet, elle montra que l’Eglise était finalement reconnue et vécue comme quelque chose d’intérieur, qui n’existe pas face à nous comme une institution quelconque mais qui vit en nous-mêmes. Si, jusqu’alors, l’Eglise avait été considérée tout d’abord comme une structure et une organisation, on prit finalement conscience que nous étions nous-mêmes l’Eglise. Elle était beaucoup plus qu’une organisation : elle était l’organisme de l’Esprit Saint, quelque chose de vital, qui nous saisit tous dans notre intimité. Cette nouvelle conscience de l’Eglise trouva son expression linguistique dans le concept de “corps mystique du Christ” » (J. Ratzinger, L’ecclésiologie de Vatican II, conférence donnée le 15/09/2001 à l’occasion de l’ouverture du Congrès pastoral du diocèse d’Aversa) ; « La véritable nature de l’Eglise – l’Eglise en tant que Corps du Christ – est cachée, et elle n’est saisissable que par la foi. Mais cette nature saisissable uniquement par la foi, s’actualise sous des formes visibles. » (W. Kasper, L’engagement œcuménique de l’Eglise catholique, conférence du 23/03/2002 à l’assemblée générale de la fédération de France, Œcuménisme informations n°325 de mai 2002 et 326 de juin 2002.

25. - “Pour le moins” : Karol Wojtyla est allé en effet beaucoup plus loin, à l’occasion de la retraite qu’il a prêchée au Vatican alors qu’il n’était que cardinal : « Dieu de Majesté infinie ! le trappiste ou le chartreux confesse ce Dieu par toute une vie de silence. C’est vers lui que se tourne le bédouin pérégrinant dans le désert quand vient l’heure de la prière. Et ce moine bouddhiste se concentre dans sa contemplation qui purifie son esprit en l’orientant vers le Nirvana : mais est-ce seulement du côté du Nirvana ? […] L’Eglise du Dieu vivant réunit justement en elle ces gens qui de quelque manière participent à cette transcendance à la fois admirable et fondamentale de l’esprit humain. » (Karol Wojtyla, Le signe de contradiction, Ed. Fayard 1979, p. 31-32)

26. - Jean-Paul II, Ut unum sint, n°42.

27.- Jean-Paul II, ibid.

28. - Jean-Paul II, Ut unum sint, n°9.

29. - Congrégation pour la Doctrine de la foi, Lettre sur certains aspects de l’Eglise comprise comme Communion, n°6, DC n°2055 du 02/08/1992, p. 730.

30. - Cf. Directoire pour l’application des principes et des normes sur l’œcuménisme (approuvé par Jean-Paul II le 25/03/1993), n°13, DC n°2075 du 04/07/1993, p. 611.

31. - Jean-Paul II, Ut unum sint, n°11.

32. - Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redintegratio, n°3 : « Ceux qui croient au Christ et qui ont reçu validement le baptême, se trouvent dans une certaine communion, bien qu’imparfaite, avec l’Eglise catholique. Assurément, des divergences variées entre eux et l’Eglise catholique sur des questions doctrinales, parfois disciplinaires, ou sur la structure de l’Eglise, constituent nombre d’obstacles, parfois fort graves, à la pleine communion ecclésiale. Le mouvement œcuménique tend à les surmonter. » Voilà pour ce qui concerne la communion visible partiellement brisée ; mais le décret ajoute aussitôt, afin de montrer la permanence de la communion invisible : « Néanmoins, justifiés par la foi reçue au baptême, incorporés au Christ, ils portent à juste titre le nom de chrétiens, et les fils de l’Eglise catholique les reconnaissent à bon droit comme des frères dans le Seigneur. [ …] De même, chez nos frères séparés s’accomplissent beaucoup d’actions sacrées de la religion chrétienne qui, de manières différentes selon la situation diverse de chaque Eglise ou communauté, peuvent certainement produire effectivement la vie de la grâce, et l’on doit reconnaître qu’elles donnent accès à la communion du salut. »

33. - Cf. Jean-Paul II, Ut unum sint, n°56, 57 et 60 ; Allocution dans la basilique Saint-Nicolas de Bari du 26/02/1984, DC n°1872 du 15/04/1984, p. 414 ; Déclaration christologique commune entre l’Eglise catholique et l’Eglise assyrienne d’Orient, DC n°2106 du 18/12/1994, p. 1070 ; Homélie prononcée en présence du Patriarche œcuménique de Constantinople Dimitrios 1er le 29/ 11/1979 à Istanbul, DC n°1776 du 16/12/1979, p. 1056 : « Je vous invite à prier avec ferveur pour la pleine communion de nos Eglises. […] Suppliez le Seigneur pour que nous-mêmes, pasteurs des Eglises-sœurs, nous soyons les meilleurs instruments en cette heure de l’Histoire, pour régir ces Eglises, c’est-à-dire pour les servir comme le veut le Seigneur, et servir ainsi l’unique Eglise qui est son Corps. »

34. - Cf. Jean-Paul II, Tertio millennio adveniente, n°16.

35. - Jean-Paul II, Discours à la délégation de la Fédération luthérienne mondiale du 09/12/1999, DC n°2219 du 06/02/2000, p. 109.

36. - Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm.  Lumen Gentium, n°8 ; Décr. Unitatis redintegratio, n°4 ; Décl. Dignitatis humanæ, n°1.

37. - Cardinal Ratzinger, L’ecclésiologie de la Constitution conciliaire Lumen Gentium, conférence du 27/02/2000, DC n°2223 du 02/04/2000, p. 311.

38. - Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redintegratio, n°3 ; Jean-Paul II, Ut unum sint, n°11

39. - Jean-Paul II, Tertio millennio adveniente, n°37.

40. - Jean-Paul II, Ut unum sint, n°77.

41.- On entend par “œcuménisme de retour” celui rappelé par Pie XI dans l’encycl. Mortalium animos : « Pousser au retour des dissidents à la seule véritable Eglise du Christ, puisqu’ils ont eu jadis le malheur de s’en séparer. Le retour à l’unique véritable Eglise, disons-Nous, bien visible à tous les regards. »

42. -Déclaration de la Commission mixte internationale pour le dialogue théologique entre l’Eglise catholique et l’Eglise orthodoxe du 23/06/1993, dite “de Balamand” , n°2 et 22, DC n°2077 du 01-15/08/1993, p. 713. Cette citation ne concerne que l’uniatisme, mais le cardinal Kasper aura des formules systématiques : « Le vieux concept d’œcuménisme du retour a été remplacé aujourd’hui par celui d’itinéraire commun, qui dirige les chrétiens vers le but de la communion ecclésiale comprise comme unité dans la diversité réconciliée » (W. Kasper, La Déclaration commune sur la doctrine de la justification : un motif d’espérance, DC n°2220 du 20/02/2000, p. 167).

43. - Conc. œcum. Vat. II, Décr. Unitatis redintegratio, n°3 : « Apparurent certaines scissions, […] naquirent des dissensions plus graves, […] parfois par la faute des personnes de l’une ou de l’autre partie ». D’où la nature de la conversion réclamée par UR, n°7 : « Il n’y a pas de véritable œcuménisme sans conversion intérieure. En effet, c’est du renouveau de l’âme, du renoncement à soi-même et d’une libre effusion de la charité que partent et mûrissent les désirs de l’unité. » Cf. Cardinal Kasper, Conférence au Kirchentag œcuménique de Berlin, DC n°2298 du 07-21/09/2003 : « “Convertissez-vous”. Il n’est aucun rapprochement œcuménique sans conversion et sans renouvellement. Non la conversion d’une confession à l’autre. Il peut y en avoir dans des cas particuliers, et si c’est pour des raisons de conscience, cela mérite respect et considération. Mais il n’y a pas que les autres à devoir se convertir, la conversion commence par soi-même. Tous doivent se convertir. Nous ne devons donc pas demander d’abord “Qu’est-ce qui ne va pas avec l’autre ?” , mais “Qu’est-ce qui ne va pas chez nous ; par où commencer, chez nous, le ménage ?” »

44. - Jean-Paul II, Ut unum sint, n°11 ; cf. n°34.

45. - Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm.  Lumen Gentium, n°13 ; cf. Jean-Paul II, Ut unum sint, n°28.

46. - Jean-Paul II, Ut unum sint, n°57.

47. - Jean-Paul II, Allocution dans la basilique Saint-Nicolas de Bari du 26/02/ 1984, prononcée en présence du métropolite de Myre, Konstantinidis (patriarcat de Constantinople), DC n°1872 du 15/04/1984, p. 414.

48. -Ibid.

49. - Jean-Paul II, Angélus du 17/01/1982, DC n°1823 du 07/02/1982, p. 144.

50. - A. Bugnini, Modifications aux oraisons solennelles du Vendredi Saint, DC n°1445 du 04/03/1965, col. 603. Cf. G. Celier, La dimension œcuménique de la réforme liturgique, Editions Fideliter, 1987, p. 34.

51. - Cf. l’Osservatore Romano italien du 26/10/2001. Admission à l’Eucharistie entre l’Eglise chaldéenne et l’Eglise assyrienne d’Orient, Note et orientations du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, DC n°2265, du 03/03/2002, p. 214.

52. - Jean-Paul II, Ut unum sint, n°38.

53.- Jean-Paul II, citant dans Ut unum sint, n°38 la Déclaration Mysterium Ecclesiæ de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (DC n°1636 du 15/07/1973, p. 267).

54. -Déclaration christologique commune entre l’Eglise catholique et l’Eglise assyrienne d’Orient, DC n°2106 du 18/12/1994, p. 1069.

55. - Jean-Paul II, Ut unum sint, n°38.

56. - DC n° 2106 du 18/12/1994, p. 1069. Cf. DzH, n°251d et 252.

57. - Déclaration commune de la Fédération luthérienne mondiale et de l’Eglise catholique, n°7 (cf. n°5, 13, 40 à 42), DC n°2168 du 19/10/1997, p. 875.

58. - W. Kasper, La Déclaration commune sur la doctrine de la justification : un motif d’espérance, DC n°2220 du 20/02/2000, p. 172.

59. - Jean-Paul II, Ut unum sint, n°95.

60. - La primauté du successeur de Pierre dans le mystère de l’Eglise, réflexions de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, DC n°2193 du 06/12/1998 p. 1018.

61. - Léon XIII, Lettre apostolique Apostolicæ curæ du 13/09/1896.

62. -W. Kasper, May They All Be One ? But how ? A Vision of Christian Unity for the Next Generation, The Tablet du 24/05/2003.