Dossier:
Campos
I
- Communiqué de la Fraternité Saint Pie X au sujet des prêtres de Campos
16 janvier 2002,
fête de St Marcel
Le 18 janvier 2002
le Cardinal Castrillon Hoyos lira dans la cathédrale de Campos les divers
documents par lesquels le Pape Jean Paul II érige une administration apostolique
en faveur des prêtres de Campos et des fidèles qui leur sont associés.
Mgr Rangel est reconnu comme un évêque catholique et nommé à la tête de
la nouvelle administration. Cette administration aura droit aux livres
liturgiques de 1962, c'est-à-dire à la messe tridentine. Les censures
"peut-être encourues" (sic) seront levées. Le pape accepte l'offre
des prêtres de Campos de combattre l'hérésie dans l'Eglise.
Mgr Rangel fera au
nom de tous la profession de foi et lira une déclaration dans laquelle
il reconnaît Jean Paul II comme pape, l'évêque du lieu comme évêque légitime,
le Concile Vatican II comme un concile de l'Eglise catholique, exprimant
cependant qu'il se réserve le droit de critiquer de manière positive ce
qui n'est pas en conformité avec la Tradition ; et de même en ce qui concerne
la nouvelle messe, reconnue comme valide en soi, mais soumise à des critiques
constructives.
La Fraternité sacerdotale
St Pie X constate que ce résultat est le fruit d'une paix séparée. Pour
l'obtenir, les prêtres de Campos ont dû en quelque sorte se démarquer
de la Fraternité. Elle fait remarquer la précipitation et le caractère
partiellement dissimulé des tractations qui ont conduit à la reconnaissance
actuelle. Ils ont par exemple abandonné la demande concernant la messe
tridentine qui aurait accordé à tout prêtre (du monde entier) de la célébrer
librement. Tout cela n'est pas bon, car la force est dans l'union. On
ne peut pas dire non plus que par cet acte, la crise de l'Eglise soit
dépassée. Cela peut être un pas dans cette direction, l'avenir le dira.
Les Pères de Campos
affirment continuer le combat de la Tradition. Il faut considérer aussi
qu'aucune concession substantielle au niveau doctrinal n'a été faite.
Le temps seul
dira comment Rome permettra le développement de cette œuvre. À ce sujet,
le choix du successeur de Mgr Licinio Rangel sera d'une grande importance.
Et ce point n'est pas déterminé. De même que le statut juridique de l'administration.
Quelles seront désormais
leurs relations avec Rome et avec nous ? C'est encore le temps qui le
dira. La situation nouvelle créée servira de test pour le futur. La Fraternité
reste très réservée et observe avec appréhension d'aussi près que possible
le développement de l'œuvre en attendant d'en voir les fruits. C'est aux
fruits que l'on juge l'arbre.
Il reste que, pour
la première fois, une structure de type diocésaine est accordée à la Tradition.
Un évêque traditionnel est maintenant reconnu comme tel, comme pleinement
catholique.
Nous prions pour
que tout cela coopère au bien de la Tradition et de l'Eglise malgré la
saveur mélangée que nous ressentons pour le moment et ne voulons que continuer
à œuvrer dans l'esprit et la ligne légués par Monseigneur Lefebvre.
En la fête de Saint
Marcel
+ Bernard Fellay
II
- Lettre de l'Union Saint Jean Marie Vianney au Pape du 15 Août 2001 (extraits)
Très Saint Père,
(...) Au nom de notre foi catholique apostolique et romaine, nous nous
sommes efforcés de garder la sainte Tradition doctrinale et liturgique
que la Sainte Eglise nous a léguée et, dans la mesure de notre faible
force et soutenus par la grâce de Dieu, de résister à ce que Votre prédécesseur
d' illustre mémoire le Pape Paul VI a appelé l' "autodémolition"
de l'Eglise. C'est de cette manière que nous espérons rendre le meilleur
service à Votre Sainteté et à la Sainte Eglise.
Très Saint Père,
Nous avons toujours
considéré être dans l'Eglise catholique, dont nous n'avons jamais eu l'intention
de nous séparer malgré la situation de l'Eglise et les problèmes qui ont
affecté les catholiques de la ligne traditionnelle, que Votre Sainteté
connaît, et qui, nous le croyons, remplissent Votre cœur comme les nôtres
de douleur et d'angoisse : cependant juridiquement nous avons été considérés
comme vivant en marge de l'Eglise.
Voici donc notre
demande : que nous soyons acceptés et reconnus comme catholiques.
Nous demandons, officiellement,
à collaborer avec votre Sainteté dans l'œuvre de la propagation de la
foi et de la doctrine catholique, avec zèle et pour l'honneur de la Sainte
Eglise - "Signum levatum in nationes " -; dans le combat contre
les erreurs et les hérésies qui menacent de détruire la barque de Pierre,
inutilement puisque "les portes de l'Enfer ne prévaudront pas contre
elle."
Nous déposons dans
les augustes mains de Votre Sainteté notre profession de foi catholique
: nous professons une parfaite communion avec la Chaire de Pierre dont
Votre Sainteté est légitime successeur. Nous reconnaissons Votre primauté
et Votre gouvernement sur l'Eglise universelle, pasteurs et fidèles .
Nous déclarons que, pour rien en ce monde nous ne voulons nous séparer
de la Pierre sur laquelle Jésus-Christ a fondé son Eglise.
Campos de Goytocazes,
Etat de Rio de Janeiro, Brésil, le 15 août 2001, fête de l'Assomption
de la Très Sainte Vierge Marie.
( suivent les signatures
de Mgr Rangel et de tous les autres membres de l'Union Sacerdotale Saint
Jean-Marie Vianney )
III
- Lettre du Pape à Mgr Rangel du 25 Décembre 2001 (extraits)
Au vénérable frère
Licinio Rangel
Et aux Chers Fils
de l'Union Saint Jean Marie Vianney de Campos au Brésil,
Nous avons reçu avec
une très grande joie pastorale le fait que vous vouliez coopérer avec
le Successeur du bienheureux Pierre à la propagation de la Foi et de la
Doctrine catholique, recherchant l'honneur de la Sainte Eglise qui est
l'étendard levé parmi les nations (Is. 11 : 12 - Maredsous) et combattant
contre ceux qui, en vain, essaient d'ébranler le Navire de Pierre parce
que " les portes de l'Enfer ne prévaudront pas contre elle "
(Mt. 16 : 18).
Nous rendons grâce
au Seigneur Un et Trine pour de si bons sentiments !
Après avoir considéré
toutes ces choses et ayant devant les yeux la gloire de Dieu, le bien
de la Sainte Eglise, ainsi que cette loi suprême qu'est le salut des âmes
(cf. can. 1752 CIC), et étant d'accord sincèrement avec votre requête
de pouvoir être admis à l'entière communion avec l'Eglise catholique,
nous reconnaissons que vous lui appartenez canoniquement.
En même temps, nous
vous informons, Vénérable Frère, qu'un document législatif va être préparé,
document qui établira la forme juridique de la confirmation de vos biens
ecclésiastiques et par lequel, le respect de vos biens propres sera garanti.
Par ce document,
l'Union sera érigée canoniquement en une Administration apostolique personnelle
qui sera directement soumise au Siège apostolique et aura son territoire
dans le diocèse de Campos. La question de la juridiction cumulative avec
l'ordinaire du lieu sera traitée. Son gouvernement vous sera confié, Vénérable
Frère, et votre succession sera prévue.
Sera ratifiée à l'Administration
apostolique, la faculté (facultas) de célébrer l'Eucharistie et la liturgie
des Heures selon le rite romain et la discipline liturgique d'après les
préceptes de notre prédécesseur saint Pie V, avec les adaptations introduites
par ses successeurs jusqu'au bienheureux Jean XXIII.
C'est assurément
avec une très grande joie, pour que pleine communion soit rendue certaine,
que nous déclarons la levée de la censure dont il est traité au canon
1382 CIC, à votre égard, Vénérable Frère, en même temps que la levée de
toutes les censures et le pardon de toutes les irrégularités dans lesquelles
sont tombés les autres membres de cette Union.
Fait au Vatican,
le 25 décembre, en la solennité de la Nativité du Seigneur, en l'an 2001,
le vingt-quatrième de notre pontificat.
IV
- Décret du 18 janvier 2002
Congrégation des
Evêques
Nomination comme administrateur apostolique de l'administration apostolique
personnelle « Saint Jean Marie Vianney ».
Décret
Pour pourvoir au gouvernement de l'Administration apostolique personnelle
« Saint Jean Marie Vianney », au territoire de Campos (Brésil),
par le présent décret de la Congrégation des Evêques, le Souverain Pontife
Jean Paul II, pontife par la Divine Providence, nomme et établit comme
administrateur apostolique Son Excellence Monseigneur Licinio Rangel,
lui donnant, en même temps, le titre épiscopal de l'Eglise de Zarnen,
avec tous les droits, les pouvoirs et les devoirs établis dans le décret
de la création de cette Administration apostolique
Donné à Rome, des Actes de la Congrégation des Evêques, le 18 Janvier
2002.
V
- Déclaration de Mgr Rangel du 18 janvier 2002
Déclaration de son Excellence Mgr Licino Rangel, Evêque titulaire de Zarna,
administrateur apostolique de l'administration
apostolique personnelle " Saint Jean-Marie Vianney "
« Je déclare, en union avec les prêtres de l'Administration Apostolique
"Saint Jean-Marie Vianney» de Campos, Brésil, les points suivants
:
- Nous reconnaissons
le Saint Père, le Pape Jean-Paul II, avec tous ses pouvoirs et prérogatives,
lui promettant obéissance filiale et offrant nos prières pour lui.
- Nous reconnaissons
le Concile Vatican II comme l'un des Conciles œcuméniques de l'Eglise
catholique, l'acceptant à la lumière de la Sainte Tradition .
- Nous reconnaissons
la validité du Novus Ordo Missae, promulgué par le Pape Paul VI, chaque
fois qu'il est célébré correctement et avec l'intention d'offrir le
véritable Sacrifice de la Saint Messe.
- Nous nous engageons
à approfondir toutes les questions encore ouvertes, prenant en considération
le canon 2121 du Code de
Droit Canon et avec un sincère esprit d'humilité et de charité fraternelle
envers tous.
In principiis unitas,
in dubiis libertas, in omnibus charitas. ? Dans les principes, unité,
dans les questions laissées en suspens, liberté, en toutes choses, charité.
(St Augustin)
Campos, Brésil, le
18 janvier 2002.
N. B. Il manque dans ce dossier le décret d'érection de l'Administration
apostolique « Saint Jean Marie Vianney » qui paraîtra dans
quelque temps.
1.
Can. 212 - § 1. Les fidèles conscients de leur propre responsabilité
sont tenus d'adhérer par obéissance chrétienne à ce que les Pasteurs sacrés,
comme représentants du Christ, déclarent en tant que maîtres de la foi
ou décident en tant que chefs de l'Église.
§ 2. Les fidèles ont la liberté de faire connaître aux Pasteurs de l'Église
leurs besoins surtout spirituels, ainsi que leurs souhaits.
§ 3. Selon le devoir, la compétence et le prestige dont ils jouissent,
ils ont le droit et même parfois le devoir de donner aux Pasteurs sacrés
leur opinion sur ce qui touche le bien de l'Église et de la faire connaître
aux autres fidèles, restant sauves l'intégrité de la foi et des mœurs
et la révérence due aux pasteurs, et en tenant compte de l'utilité commune
et de la dignité des personnes.
VI
- Commentaire du Père Georges Cottier, O.P., théologien du pape (extraits)
(Agence de Presse Zenit, 2002-01-20)
Question
de Zenit : Qu'est ce qu'il y a de nouveau dans cet événement
(l'accord Rome-Campos) ?
Père Cottier
: Il y a beaucoup plus (que la célébration de la messe selon le missel
de St. Pie V) dans le schisme de Lefebvre : il y a le rejet du Concile,
de l'oecuménisme et du principe de la liberté religieuse - un rejet global
dont la liturgie n'était que le drapeau, bien que beaucoup de personnes
ont suivi Lefebvre précisément pour cette raison.
Depuis la rupture
(en 1988) jusqu'à aujourd'hui, d'autres personnes parmi ses adeptes sont
retournés et ont retrouvé une plein communion avec l'Église catholique.
Cependant, la principale condition a toujours été la reconnaissance entière
de l'autorité du Concile Vatican II. Et c'est cela que le groupe principal,
celui d'Écône, n'a jamais accepté jusqu'à présent.
Question
: Oui, mais en étendant l'usage du rite de Pie V, n'augmente-t-on
pas le risque de confusion ?
Père Cottier
: Des différences ont toujours été permises. Je suis un Dominicain : jusqu'au
Concile nous avions une liturgie dominicaine qui était une variante du
rite romain. Mais l'unité n'était pas compromise par cela.
On peut très bien
accepter " Sacrosanctum Concilium " (la constitution du Concile
sur la Liturgie) tout en gardant sa propre spécificité. Souvenons-nous
que le Concile lui-même n'a pas demandé que toute la célébration de la
messe soit en langue vernaculaire : le Canon aurait dû rester en latin.
La réforme liturgique
alla plus loin, et, voyant la majorité des Catholiques, ce fut un choix
approprié. Mais cela ne veut pas dire que le désir de trouver de nouveau
dans la tradition un sens plus profond d'intériorité, de silence, de beauté,
est, en soi, inadmissible.
Question
: Comment peut-on concilier cette spécificité avec une communion
effective avec toute l'Église ?
Père Cottier
: Beaucoup de Lefebvristes tiennent que " notre " messe de Paul
VI n'est pas valide.2 Maintenant
du moins, ce groupe ne pourra pas penser une telle chose. Petit à petit
nous devons nous attendre à d'autres pas : par exemple, qu'ils participent
aussi à des concélébrations dans le rite réformé. Mais nous ne devons
pas être pressés. Ce qui est important c'est qu'il n'y a plus de rejet
dans leur coeur. La communion retrouvée dans l'Église possède un dynamisme
intérieur propre qui va mûrir.
Question
: Avec la cérémonie de vendredi dernier, l'application du Concile
a-t-elle fait un pas en avant ou en arrière ?
Père Cottier
: Certainement un pas en avant. Vatican II n'a pas désiré créer
une rupture. Son intention était de mieux harmoniser l'Église avec les
défis pastoraux, avec la mission, avec le culte divin lui-même.
J'espère que (cette
réconciliation) ouvrira la porte à d'autres. Dans ce processus, la communion
avec le successeur de Pierre est fondamentale. Aussi en Liturgie : jusqu'à
maintenant, dans la messe célébrée par les Lefebvristes, il n'y avait
pas de " communication " avec le Pape. Maintenant, au moins
au Brésil, cela ne sera plus ainsi.
2.
Mgr Marcel
Lefebvre n'a jamais dit que la nouvelle messe était en soi invalide, c.a.d.
ne réalisant pas la présence réelle de Notre Seigneur sur l'autel à l'état
de victime, mais il a toujours affirmé que la nouvelle messe, par son
rite, est mauvaise en ce sens qu'elle favorise l'hérésie protestante,
et la perte de la vraie foi. (NDLR)
VII
- Réaction de l'abbé Peter Scott, Supérieur du district des U.S.A. de
la Fraternité S. Pie X (extraits)
Le thème de cette
cérémonie conjointe entre les modernistes et les traditionalistes (à Campos)
était : « unité dans la diversité ». C'est en fait le fondement
de la messe de l'Indult, selon ce qu'on trouve dans le Motu Proprio Ecclesia
Dei adflicta de Jean-Paul II en 1988, et telle est aussi la base de
cette réconciliation comme le décrit la déclaration commune de Mgr Rangel
et de Mgr Norberto Guimaraes (l'évêque conciliaire de Campos) :
« Nous nous
rappelons de plus l'invitation de Saint Père, le Pape Jean-Paul II :
'Tous les pasteurs et les autres fidèles doivent prendre une nouvelle
conscience non seulement de la légitimité mais aussi des richesses que
la diversité des charismes, traditions, spiritualités et apostolats
représente pour l'Église. Cette diversité constitue aussi la beauté
de l'unité dans la diversité : c'est la symphonie que, sous l'action
du Saint-Esprit, l'Églis de la terre élève au ciel' (Motu Proprio Ecclesia
Dei adflicta). C'est donc avec une joie intense que nous communiquons
à tous ce geste de bonté du Saint-Père, le Pape, souhaitant une union
toujours plus grande parmi les Catholiques - 'unité dans la diversité'
- comme le souhaite le Saint-Père, pour la plus grand gloire de Dieu
et l'honneur de la sainte Église ».
Nous devons certainement
respecter les bonnes intentions des prêtres de Campos, qui n'ont pas attaqué
le refus de la Fraternité S. Pie X de conclure un accord, mais qui ont
simplement dit que leur situation est différente, puisqu'ils sont tous
dans un même diocèse. Nous devons aussi reconnaître qu'ils n'ont pas fait
de compromis à la manière des prêtres de la Fraternité Saint-Pierre, qui
ont accepté en principe la célébration de la nouvelle messe et la théologie
post-conciliaire.
Cependant, nous sommes
certainement tristes du fait qu'ils ont mis en sourdine la position claire
si bien exprimée dans leur livre publié en 1999 : Catholiques, Apostoliques
et Romains, et que cette division dans la Tradition s'est produite
pour obtenir un statut canonique. Nous regrettons que les prêtres de Campos
aient choisi la voie plus facile, la voie de moindre résistance. Combien
différents furent les paroles héroïques de Mgr de Castro Mayer, dans une
situation semblable, le 30 juin 1988 :
" Je veux
manifester ici mon adhésion sincère et profonde aux positions de son
Excellence Monseigneur Lefebvre, dictées par sa fidélité à l'Église
de tous les siècles. Chacun de nous, nous avons bu à la même source
qui est celle de la Sainte Catholique et Apostolique Église romaine
".
De plus, nous ne
pouvons nous empêcher de déplorer leur reconnaissance implicite qu'ils
étaient hors de la pleine communion éclésiale avant que cette cérémonie
eut lieu. La Fraternité St. Pie X a insisté, comme principe, comme condition
préalable à des discussions, que le Vatican déclare que les excommunications
étaient nulles et invalides, que Mgr Lefebvre avait des raisons suffisantes
pour consacrer des évêques et que nous sommes et avons toujours été des
bons Catholiques. Ce principe a été abandonné par les prêtres de Campos.
De plus, le concept moderniste des degrés de communion a été accepté à
la place de l'enseignement traditionnel contenu dans le dogme " il
n'y a pas de salut en dehors de l'Église ". Avant Vatican II, on
ne parlait pas de communion éclésiale parfaite ou imparfaite. On était
ou bien Catholique, dans l'Église, ou excommunié, en dehors de l'Église,
sur la voie de la perdition éternelle. Il n'y a pas de milieu. Mais pour
les modernistes, les autres Chrétiens et les autres croyants sont dans
des degrés divers dans un état de communion imparfaite, bien qu'ils ne
soient pas actuellement membres de l'Église Catholique Romaine. Ce concept
qui détruit toute l'idée d'une Église Une est sous-jacent à cette affirmation
selon laquelle les prêtres de Campos sont seulement maintenant en pleine
communion avec l'Église.
Cependant, le pire
est l'acceptation du principe de l'Indult de « l'unité dans la diversité
», à savoir que nous pouvons être un avec d'autres « Catholiques
» dans les diverses expressions de leur expérience religieuse, incluant
les charismatiques et les modernistes de toute espèce. Le principe d'unité
n'est pas la diversité. C'est une pure contradiction pour toute personne
qui n'embrasse pas la conception moderniste de la religion comme étant
une collection des expériences personnelles intérieures de chacun. Au
contraire, le principe d'unité vraie est la Tradition catholique, telle
qu'exprimée dans le catéchisme, à savoir : professer la même foi, participer
au même sacrifice et aux mêmes sacrements, unis sous la même tête unique,
le Pape. Nous ne sommes un avec les Catholiques du Nouvel Ordo qu'en tant
qu'ils tiennent à ces vérités, malgré la direction révolutionnaire donnée
par les modernistes à l'Église, et nous ne sommes sûrement pas un avec
toute personne qui renie sciemment et volontairement l'une quelconque
de ces vérités.
La coïncidence de
cette cérémonie de régularisation avec le sommet d'Assise II, cette rencontre
de toutes les religions le mois dernier pour prier pour la paix, ne fait
qu'ajouter à notre tristesse. Puisque ce fut la première rencontre d'Assise,
en 1986, qui convainquit Mgr Lefebvre de la destruction du sens de la
foi et de la gravité de la crise de l'Église et qui le poussa à consacrer
des évêques, c'est maintenant cet Assise II qui doit nous réveiller en
nous rappelant que l'oecuménisme est toujours vivant et bien portant,
qu'il continue de détruire l'Église de l'intérieur, dans sa moëlle, et
que c'est notre devoir de rester fermes et de faire réparation pour cela.
Ce n'est sûrement pas en acceptant d'être unis dans la diversité avec
des oecuménistes que nous ferons cela. C'est pour cette raison que Mgr
Fellay a demandé qu'on fasse une journée de réparation dans tous nos prieurés
et nos principales chapelles.
VIII
- Réaction du Père Laurent Fleichman O.S.B. (extraits)
Texte tiré de la
revue « Le Sel de la Terre " (Couvent de la Haye aux Bonshommes,
F-49240 Avrillé), no 39. Cette lettre date du 30 octobre 2001, donc avant
la réconciliation entre Campos et le Vatican. Le Père Laurent était un
moine du Barroux, en France, quand un accord fut signé en 1988 entre Dom
Gérard Calvet et le Vatican. En conscience, le Père Laurent dut quitter
le monastère pour rester fidèle au combat pour la Foi. Il dessert maintenant
une chapelle indépendante à Niteroi, près de Rio de Janeiro.
« Voici la
première ressemblance que je vois entre l'attitude de Dom Gérard et la
vôtre : Mgr Lefebvre venait de refuser un accord, faute d'avoir perçu,
dans les intentions du Vatican, les garanties nécessaires à la survie
de la Tradition. Dom Gérard, estimant les intérêts particuliers de son
monastère audessus des intérêts de l'Église, accepta de se séparer de
Mgr Lefebvre pour retrouver une situation juridique et canonique 'normale',
laissant tomber l'épée du combat.
« Aujourd'hui
également, la Fraternité venait de refuser un accord pour les mêmes motifs
que Mgr Lefebvre, et vous préférez considérer votre bien particulier et
non pas le bien commun de l'Église. Vous vous êtes lassés de vivre jour
et nuit dans le combat et dans la marginalisation.
« J'ai dit
en 1988 à Dom Gérard, ce que je vous répète aujourd'hui : des milliers
de fidèles attendent, anxieux, que vous les confirmiez dans la foi catholique,
dans le combat qu'exige de nous la divine Providence, sans se laisser
aller à la fatigue, à la faiblesse, au chant des sirènes d'une légalité
piégée. Ce que Notre-Seigneur exige, c'est le martyre goutte-à-goutte
et la claire et limpide profession defoi catholique, sans pacte avec les
modernistes du Vatican.
« Le pape,
oui ; la légalité juridique, oui. Néanmoins, avant tout, répondre au clair
appel de Dieu pour le combat de la foi. Le jour où le pape se convertira
vraiment, cela apparaîtra plus clairement que la lumière du soleil. Évidemment,
ce n'est pas en baisant le Coran, ni en allant prier dans une mosquée
qu'il nous montre cette conversion. »
IX
- Réaction du Père Thomas d'Aquin, O.S.B., prieur du monastère de la Sainte
Croix à Nova Friburgo, Brésil.
d'après
la version anglaise parue dans Catholic (Golgotha Monastery Island,
Papa Stronsay, Orkney Isles, Scotland, UK, KW17 2AR), mars 2002, traduite
par nos soins.
« Nous partageons
entièrement les craintes de Mgr Fellay et de toute la Fraternité Saint-Pie
X comme de toute la famille de la Tradition à travers le monde lorsque
nous voyons nos amis de Campos engagés dans un processus d'accord avec
Rome sans que la question doctrinale n'ait été résolue. Ce que Mgr Fellay
a refusé est sur le point d'être accepté ou a déjà été accepté par Campos.
La Fraternité Saint-Pie X a eu l'ample occasion d'apprendre à connaître
les idées et les intentions de Rome. S'il le voulait, Campos pourrait
profiter de cette expérience. Mais elle doit le vouloir. Prions pour nos
amis, nos compagnons d'armes dans tant de batailles. Ont-ils oublié ces
paroles de Mgr Lefebvre : 'Préparez-vous pour un combat qui durera longtemps'
? Le combat sera long. 'Rome' n'est pas encore convertie. Pie XII a prédit
que la principale tentation pour les Catholiques dans les années à venir
sera la lassitude dans la longueur du combat. Ne devenons pas las du combat
de sorte que nous puissions dire un jour avec saint Paul : 'J'ai combattu
le bon combat, j'ai terminé ma course, j'ai gardé la foi' (2 Tim. 4 :7).
Ne nous lassons pas non plus de prier pour Campos, pour ses prêtres et
ses fidèles, pour que leur combat puisse être marqué aussi bien par le
zèle que par la prudence ».
X
- Commentaire du journal Catholic, publié par les pères Rédemptoristes
transalpins, en Écosse, Mars 2002
«
Le 22 août 1999, les prêtres de Campos déclarèrent :
'Il n'y a pas, de
notre part, un refus systématique de soumission au pape et aux évêques.
Nous rejetons absolument toute intention, désir ou esprit de schisme.
Nous ne formons pas un parti 'Lefebriste' ou 'traditionnel'. Nous sommes
des Catholiques romains apostoliques. Nous répétons : notre résistance
aux autorités écclésiastiques est circonstantielle, temporaire, et limitée
aux points sur lesquels ces mêmes autorités se distancent elles-mêmes
de la doctrine de toujours. Lorsque les autorités écclésiastiques recommenceront
sans condition à enseigner et à faire ce que l'Église a toujours enseigné
et fait, nous ... serons tous à la complète disposition de ces mêmes autorités.'
(Catholiques, Apostoliques et Romains).
« Ces mots
ne pourraient mieux résumer notre propre position et celle de tous les
traditionalistes.
« Les autorités
écclésiastiques n'ont pas recommencé 'sans condition à enseigner et à
faire ce que l'Église a toujours enseigné et fait' ; Assise II en est
une preuve suffisante. Et cependant nous notons avec tristesse que les
auteurs de cette déclaration se sont placés 'à la disposition totale de
ces mêmes autorités'.
« Nous ne pensons
pas que leur cas peut être comparé adéquatement à celui de Dom Gérard
et le Barroux, ou de l'abbé Bisig et la Fraternité St. Pierre. (...) Nous
partageons de tout coeur les vues exprimées par Mgr Fellay dans sa déclaration
du 16 janvier. Seul le temps dira si l'union sacerdotale Saint Jean-Marie
Vianney demeurera fidèle aux principes de Mgr de Castro Mayer ou si elle
ne deviendra pas tout simplement une garantie au pluralisme de l'Église
conciliaire "».
XI-
Le mot du Supérieur Général
Publié dans D.I.C.I
no 44, 1 mars 2002, ce document vient tout juste de nous arriver. Il complète
et précise la première déclaration de Mgr Fellay du 16 janvier dernier.
DICI, Documentation Informations Catholiques Internationales, est un service
de presse de la Fraternité Saint Pie X. Pour les abonnements : par voie
électronique : www.le-combat-catholique.com
; par voie postale : Service de Presse DICI, Schwandegg CH - 6313 MENZINGEN,
SUISSE.
La conjonction, à
quelques jours près, de la reconnaissance de Campos par Rome, que certains
pensent être une reconnaissance de la Tradition, et de la journée d'Assise,
qui est à l'extrême opposé de la Tradition, présente une telle contradiction
qu'elle nous oblige à un regard approfondi ; la démolition systématique
de tout ce qui est traditionnel dans l'Eglise depuis le concile Vatican
II impose une cohérence logique dans l'œuvre entreprise. Avant de saluer
la reconnaissance de Campos comme un retour de Rome à la Tradition, nous
sommes obligés de nous demander si cet événement ne peut pas aussi, ne
doit pas aussi, être inséré dans la logique post-conciliaire: et précisément
la journée d'Assise fournit un argument probant en faveur de cette thèse.
Si la Rome post-conciliaire est capable de réunir tant de religions, on
peut même dire toutes les religions, pour une cause commune religieuse,
comment ne pourrait-elle pas aussi trouver une petite place pour la Tradition
?
Faut-il y voir un
dilemme pour Rome : résorber le «schisme de la Tradition»
en l'acceptant, alors que cette dernière s'est montrée jusqu'ici exclusive
et condamnatoire (et donc accepter qu'elle a raison contre la Rome moderniste)
ou continuer dans la ligne des réformes ? Très manifestement, la ligne
des réformes est maintenue comme principe intangible et irréversible.
Donc la condition que Rome doit poser pour l'acceptation d'un mouvement
traditionnel est l'accord de principe du Concile (on peut discuter sur
les nuances et certaines conclusions). C'est le pas obligé. C'est l'entrée
dans le pluralisme sous apparence de reconnaissance de la part de Rome,
qui est imposé, ce n'est pas le retour de l'Église conciliaire à la Tradition.
Le Cardinal Castrillón me reproche cet argument. Ce ne serait pas au nom
du pluralisme que Rome désire notre retour, ce n'est pas dans une situation
pluraliste que l'on veut nous placer. Et pourtant.
La condition pour
réaliser ce nouveau prodige a été exprimée par le Cardinal Castrillón,
acteur de l'accord camposien, dès avant le début des discussions dans
un article de 30 Giorni d'abord en automne 2000, dans la Nef ensuite,
finalement à Campos, lors d'une conférence de presse, le 19 janvier 2002.
Le théologien de la maison pontificale, le Père Cottier, n'a pas usé d'autre
argument d'ailleurs : l'acceptation du Concile est manifestement le point
majeur et déterminant (vient ensuite l'acceptation de la nouvelle messe).
C'est le principe d'où est partie la révolution dans l'Église, et de fait,
tout le reste suit. Devant ce fait, il me semble que nous nous trouvons
devant une ambiguïté de plus par rapport à l'Eglise conciliaire : lorsque
nous disons accepter le Concile avec des restrictions (refuser ce qui
est contraire à l'enseignement pérenne, interpréter l'ambigu à la lumière
de la Tradition, accepter le toujours enseigné), il semble bien que nous
disons tout autre chose que ce qu'en comprennent les romains. Car fondamentalement,
nous considérons ce Concile comme la grande catastrophe du XXe siècle,
la cause de dommages incalculables faits à l'Eglise et aux âmes, alors
qu'eux y voient le grand miracle du XXe siècle, le bain de jouvence de
l'Église.
Tout le reste suit
: Le Père Cottier annonce le prochain pas que "l'on" attend
de Campos : la concélébration de la nouvelle messe, bien entendu. Et Mgr
Perl dit que cela se fera piano piano, petit à petit. Piano piano, les
prêtres et les fidèles de Campos seront réintégrés dans le diocèse et
dans "l'Église" postconciliaire. Lui aussi prévoit que cela
se fera assez vite, cependant. On ne peut pas attribuer à Mgr Perl ces
pensées seulement au nom d'une vengeance pour avoir été tenu à l'écart
des négociations; c'est la pensée dominante de la Rome conciliaire.
Campos ne veut pas
le savoir. La réalité se fera bien vite sentir. Très probablement trop
tard. Ils pensent encore que de la part de Rome, c'est la reconnaissance
de la Tradition. Alors que le contraire vient de se passer. Une partie
de la Tradition, un mouvement traditionnel, a accepté, avec quelques réserves,
certes, la réalité post-conciliaire. Rome estime le pas suffisant. On
doit d'ailleurs remarquer que pour la première fois, on a fait d'un Concile
non dogmatique un critère de catholicité déterminant.
Attendons la publication
des statuts définitifs de l'Administration apostolique, qui n'ont pas
encore été communiqués aux intéressés. Lu la veille du 18 janvier aux
prêtres de Campos, le texte a été ramené à Rome pour amélioration. Un
mot manquait, seuls la messe et le bréviaires traditionnels étaient prévus,
il manquait les sacrements.
En ce qui concerne
la nomination de l'évêque de l'Administration, elle est réglée par le
droit commun. Pour la nomination des évêques diocésains, le Vatican n'est
pas obligé de choisir un prêtre du diocèse. Pour une administration qui
compte 25 prêtres, on peut comprendre facilement que Rome ne veuille s'obliger
à une telle limitation. Si le successeur immédiat de Mgr Rangel sera encore
choisi parmi les membres de l'Union sacerdotale Saint Jean Marie Vianney,
ce qui n'est pas certain, ce ne sera que par une "miséricorde"
spéciale et diplomatique. À noter aussi que les limites territoriales
de cette Administration apostolique personnelle sont très strictes : le
diocèse de Campos. Ainsi la réintégration dans le diocèse, chose annoncée
par Mgr Perl, ne sera pas difficile.
Nous avouons ne pas
comprendre comment, dans la situation que nous vivons, Campos ait pu si
légèrement se lancer dans cette aventure sans prendre ou demander aucune
mesure protectrice.
On a beau vanter
les avantages acquis par la nouvelle structure canonique, le droit à la
messe tridentine, par exemple, un évêque traditionnel, aussi, le fait
que sur le papier, rien de substantiel n'aurait été galvaudé : la fragilité
de l'Administration d'une part, la stabilité de la ligne réformatrice
vaticane d'autre part, sont des arguments suffisants pour prédire la chute
de Campos malgré toutes les déclarations de meilleure intention. De plus,
il faut bien distinguer un manque à la vertu de foi elle-même, d'un défaut
dans la confession publique de la foi qui est nécessaire dans certaines
circonstances comme l'a si bien rappelé Mgr de Castro Mayer le jour des
sacres. Or une prévarication comme celle d'Assise réclame cette confession
publique… que nous n'avons pas entendue venant de Campos.
La situation ne retrouverait
un intérêt particulier pour nous que si subitement ils se mettaient à
résister et en arrivaient à un affrontement avec la Rome moderniste. "
+ Bernard Fellay
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