L’éducation
des enfants commence bien avant l’âge de cinq ans Suite
Par
les religieuses dominicaines enseignantes de l’école Saint Dominic, Post
Falls, Idaho. Comment
la famille et l’école doivent combiner leurs efforts pour apprendre les
vertus aux enfants.
A.
La vie de l’école est une partie intégrante de la vie familiale
1. Nous entendons
parfois des affirmations comme celle-ci : « L’école ne doit
pas interférer avec la vie familiale. – Moi, le père, je décide que mes
enfants ne resteront pas à l’école mais demeureront à la maison pour une
activité familiale. Je n’ai pas à demander de permission, c’est moi qui
décide ». Quelque-chose ne va pas dans cette attitude qui doit être
changée.
Il est vrai qu’il
pourrait y avoir une interférence exagérée de l’école avec la vie familiale,
si par exemple l’école prétendait diriger votre vie privée et vos foyers.
Mais ce n’est pas ce que nous faisons.
2. Vous devez
en effet considérer l’école comme une partie de la vie de famille, puisque
l’école est votre plus grande aide dans l’éducation de vos propres enfants.
Vous devez vouloir cette aide, et supporter l’école dans cette tâche.
C’est ainsi que vous aimerez vous enfants pleinement, en leur procurant
ce dont ils ont absolument besoin pour se développer proprement, c’est-a-dire
cet enseignement et cet apprentissage des vertus sans lesquels ils ne
peuvent pas devenir des adultes bons.
3.
Pourquoi avons-nous besoin de l’école ?
a) Personne
n’est universel. Nous admettons tous la nécéssité qu’il y ait des professionnels
dans chaque discipline. Lorsque votre enfant est malade, allez-vous consulter
le voisin, ou bien un professionnel de la santé? Si votre vue est affectée,
n’allez-vous pas consulter un spécialiste des yeux ? Pourquoi ? Si vous
désirez acquérir un bel ensemble de meubles pour votre salle à manger,
n’allez-vous pas faire affaire avec un ébéniste professionnel, ou un magazin
spécialisé ? Pourquoi ? Vous savez la réponse.
b) Et lorsqu’il
s’agit de l’art le plus difficile entre tous, la formation d’une âme rationnelle
pour qu’elle devienne instruite, sage, vertueuse, forte et sainte, comment
des parents peuvent-ils penser qu’ils n’ont pas besoin de recourir à des
« professionnels » de l’éducation et de l’enseignement tels
que les ordres religieux fondés et approuvés par l’Eglise pour ce but
? La voie normale, la seule bonne voie normale pour cette oeuvre de formation
des âmes est d’envoyer les enfants à une école catholique. Une des conséquences
les plus tragiques du modernisme est d’avoir effacé de la surface de la
terre quasiment tous les ordres religieux dédiés à l’enseignement. Rendez-vous
compte alors combien nous et vous sommes bénis d’en avoir un, alors que
presque plus personne autour de vous ne possède ce trésor. Combien nous
devrions être reconnaissants aussi à la Fraternité Sacerdotale Saint Pie
X qui multiplie les écoles sans ménager son énergie, son temps et ses
efforts pour compenser justement cette disparition des ordres religieux
enseignants.
c) Les parents
à la maison n’ont pas assez de temps à consacrer à l’enseignement de tous
leurs enfants. Le père travaille à l’extérieur tout le jour, et la mère
doit prendre soin des tâches domestiques, et des petits. Elle n’a pas
assez de liberté pour enseigner tous ses enfants, et si elle essaye de
combiner les deux tâches, de mère et d’enseignante, habituellement elle
s’épuise, se « brûle », elle ne peut plus faire face à tous
ses devoirs essentiels. Le résultat habituel : un enseignement très
pauvre, tout au moins dès qu’il s’agit de pousser plus loin que les éléments
de base. Lorsqu’il n’y a aucun moyen de faire autrement, évidemment vous
choisissez le moindre mal de l’enseignement à la maison, mais cela ne
constitue pas l’état normal.
d) Par ailleurs,
les parents ont rarement des connaissances suffisantes pour remplacer
l’école. Ce n’est pas qu’ils ne savent rien. Mais comment un individu
peut-il être universel ? Quelqu’un peut être doué en mathématiques, mais
non pas en français. L’un peut être bon en géographie, mais non pas en
histoire. L’école au contraire, avec un corps professoral varié, peut
offrir aux enfants un enseignement compétent et de qualité dans tous les
sujets nécéssaires à une formation harmonieuse et utile.
e) Car l’enseignement
du seul catéchisme avec un peu de mathématiques et de français ne suffit
pas pour que les enfants deviennent de vrais adultes, au niveau naturel
comme au niveau surnaturel. Je vous réfère ici à notre dernière conférence
aux parents (novembre 1998) dans laquelle nous expliquions les principes
élevés qui éclairent notre programme. Il est nécéssaire tout d’abord que
les enfants approfondissent leurs connaissances religieuses par des solides
classes de doctrine catholique; ensuite qu’ils approfondissent leur connaissance
de l’âme humaine, des valeurs humaines sous la lumière de la foi, et ceci
est le rôle de sérieuses classes de littérature et de philosophie. Il
faut aussi qu’ils saisissent toute l’étendue de la vie chrétienne, comment
la grâce doit pénétrer non seulement leur vie individuelle mais aussi
leur vie sociale, et toute la société dans son ensemble, jusqu’à vouloir
se battre pour des institutions chrétiennes. L’enseignement de l’histoire
a un rôle capital dans cette formation. Une bonne connaissance des mathématiques,
des sciences et de la géographie étudiés dans une perspective chrétienne,
sera d’un secours extraordinaire pour saisir la beauté et l’ordre de l’univers,
ses lois, son but , etc. Et les parents n’auraient pas besoin d’enseignants
professionnels pour ouvrir l’âme de leurs enfants à toutes ces vérités,
et les conduire petit à petit à une vue unifiée de toutes choses de cette
vie ? En réalité, les professeurs professionnels sont nécéssaires pour
stimuler les enfants dans ce désir de savoir toujours plus et mieux, pour
leur apprendre à penser et à se développer harmonieusement. L’enseignement
autodidacte est, sauf exception, à vision très limitée et chaotique, sans
ordre ni unité.
f) Les parents
ont réellement besoin de l’école pour les aider dans cette tâche extraordinaire
confiée à leur responsabilité, l’éducation de leurs enfants. L’école est
là pour compléter ce que donnent les parents, et suppléer ce qu’ils ne
peuvent assurer. L’école devrait être la plus grande joie et le plus grand
soulagement pour eux. En confiant leurs enfants à des écoles vraiment
catholiques, ils montrent leur confiance en notre sainte Mère l’Eglise,
et par le fait même leur sagesse et leur prudence.
g) Considérons
aussi cette vérité que, dans le processus de l’éducation, l’apprentissage
de connaissances à un rôle premier. L’ignorance est la cause principale
de quantité de fautes dans l’ordre moral, dans la sphère individuelle,
comme dans la vie sociale et dans la vie spirituelle. Notre intelligence
est un faculté pour connaître, une faculté de lumière et d’illumination.
Encore une fois, si être vertueux consiste à agir selon la droite raison
éclairée par la foi, alors la première étape nécéssaire consiste à savoir
ce que la droite raison commande. Connaître est la première condition
nécéssaire pour la vertu. C’est pour cela que l’école est si importante
pour l’éducation des vos enfants. Sa tâche principale est de leur donner
une connaissance solide de ce qu’il faut savoir pour vivre une bonne vie
dans toute l’étendue de la nature, de la grâce et de la foi, ce qui est
tout le contraire d’une mentalité individualiste.
h) L’école
est aussi nécéssaire pour donner aux enfants le sens du bien commun, et
de la vie en société : c’est en se soumettant, et se dédiant
à ce bien supérieur de l’ensemble de la société que les individus atteignent
réellement leur fin, et par voie de conséquence, leur plein développement
dans l’harmonie. En un sens, l’individu est pour la société, et non l’inverse.Ceci
est la pure doctrine de l’Eglise, voyez par exemple saint Thomas d’Aquin.
L’individualisme qui renverse cet ordre en centrant tout sur la personne
individuelle est en fait révolutionnaire, destructeur de la société et
de l’ordre voulu par Dieu. Il conduit à l’anarchie et, par contrecoup,
à l’esclavage.
4.
Comment, en pratique, faire en sorte que l’école fasse partie de votre
vie de famille ?
a) D’abord,
vous devez considérer l’école comme telle, comme faisant partie de votre
vie de famille. Votre agir en découlera.
b) L’école
sera l’une de vos préoccupations majeures, l’une de vos joies principales,
et ne sera pas considérée comme un fardeau insupportable qui « dérange
votre vie de famille ».
c) Vous manifesterez
explicitement à vos enfants l’importance majeure que vous attribuez à
leurs études. Il devrait être manifeste à vos enfants que vous vous intéressez
à leurs études.
d) Comment
? Suivez et intervenez dans leurs travaux scolaires de multiples façons :
1) Questionnez-les,
demandez-leur ce qu’ils ont appris aujourd’hui a l’école en catéchisme,
en français, en histoire, en géographie, en science, etc. Demandez-leur
de vous résumer les points principaux. Voyez s’ils ont compris les leçons
ou non. Intéressez-vous réellement aux matières enseignées à l’école.
Suivez ce qu’ils font. Exprimer votre désir de connaître demain la suite
de la leçon d’histoire en vue de stimuler ce même désir chez votre enfant.
Dites-leur votre impatience de connaître comment ces personnages ou
événements ont évolué; montrez un intérêt pratique pour les matières
que vos enfants étudient. S’ils ne peuvent pas répondre, ni répéter
ce qui leur a été enseigné le jour même, réprimandez-les. Dites-leur
que c’est une faute, une honte. Menacez les de punition si le lendemain
ils reviennet encore à la maison en ayant tout oublié. Vos enfants ont
besoin de votre volonté pour leur montrer le chemin. Ceci constitue
95% de votre travail. Et cela supprimerait 95% des problèmes que nous,
enseignants, rencontrons chaque jour. Comment se fait-il que si peu
de nos enfants ont soif de connaître, d’aller plus loin dans les connaissances,
d’établir des liens entre des concepts et entre différentes matières
? C’est parce que cela ne fait pas partie de leur vie, c’est quelque-chose
de trop extérieur. L’étude est perçue comme un fardeau, quelque-chose
qui idéalement ne devrait pas exister. Mais pourquoi une telle mentalité
? Parce que les parents ne manifestent pas assez d’intérêt dans les
études de leurs enfants. Je dis : « ne manifestent pas
assez ». Car ils se peut qu’ils y croient, mais s’ils ne le montrent
pas assez, d’une façon pratique, ou pire, et à Dieu ne plaise, s’ils
ont tendance à se plaindre et à critiquer le travail scolaire comme
un fardeau, comment peuvent-ils s’attendre à ce que leurs enfants consacrent
à leurs études le meilleur de leur temps et de leurs efforts volontairement
? C’est impossible ! Ou alors cela se produit très tard, vers la fin
de leurs années d’études, lorsque, malgré le manque d’encouragement
à la maison, les enfants découvrent parfois par eux-mêmes le bien des
connaissances, et deviennent désireux d’étudier sérieusement. Entre-temps
les professeurs dépensent temps et énergie quasiment en vain, et cela
à cause de l’absence de collaboration pratique et quotidienne de la
part des parents.
Cela fait un monde
de différence dans l’esprit de l’enfant, son désir d’apprendre, son
travail, si papa et maman s’intéressent à ce qu’il a appris « aujourd’hui »
à l’école. Alors l’école devient une partie véritable de sa vie. Et
sa vie commence à s’unifier. La vie à l’école et la vie à la maison
deviennent une, parce que c’est le même but que l’école et la famille
tendent à réaliser ensemble, chacun selon sa mission et responsabilité
propre et providentielle, mais ensemble, en harmonie. Les intérêts de
l’école sont ceux des parents, et les intérêts des parents sont ceux
de l’école. Et les deux ensemble sont les intérêts de notre sainte Mère
l’Eglise, et donc ceux de Notre-Seigneur. Rien de moins ne devrait exister
dans ce travail commun de l’école et de la famille.
2) Le deuxième
point doit être de considérer l’étude comme l’un des pricipaux devoirs
d’état de vos enfants. Or combien de nos enfants considérent de
fait leurs études comme l’un de leurs principaux devoirs d’état ? J’ai
peur que je ne puisse pas l’assurer même de 20 % d’entre-eux. S’ils
savaient que leurs études constituent leur principal devoir d’état,
par lequel ils doivent montrer leur obéissance et leur amour de Dieu,
et que le mépris de ce devoir constitue un péché, je pense qu’ils seraient
beaucoup plus sérieux dans leur travail scolaire. L’assistance à la
messe, le rosaire quotidien devraient engendrer un sens et un amour
du devoir toujours plus grands se manifestant en l’accomplissement plus
exact de leurs devoirs quotidiens, sans quoi la piété des enfants, leur
dévotion est fausse et insignifiante. C’est à vous parents qu’il incombe
d’enseigner chaque jour à vos enfants la primauté de ce devoir d’état,
son sérieux, et comment faire des progrès dans l’accomplissement de
ce devoir. Il est effrayant de voir des jeunes filles baptisées et comfirmées
qui ne se soucient aucunement du sérieux de leurs études, à tous les
niveaux : attention en classe, efforts de réflexion, propreté de
la présentation, efforts de mémorisation, docilité pour suivre les instructions...
Si elles comprenaient que leur amour de Notre Seigneur est inséparable
de leur sérieux dans les études, elles ne seraient pas sans doute parfaites
tout d’un coup, et ce n’est pas cela que nous attendons, mais au moins
elles feraient effort pour acquérir ce sérieux, leur conscience se formerait,
elles sauraient qu’elles font mal et sont coupables si elles montraient
cette insouciance que nous n’arrivons même pas à leur faire voir. Certaines
filles semblent n’avoir aucune cure de leur conscience. Et cela nous
inquiète. Et c’est pour cela que j’insiste fortement sur ce point. Personne
ne peut vous remplacer en cela : votre responsabilité pour former
leur conscience, pour leur inculquer un sens vrai et exact de leurs
devoirs, et du sérieux de ceux-ci. Si vous, parents, ne le faites pas,
quelque leçon que ce soit que vos enfants recoivent à l’école à ce sujet
ne « clic » pas en eux, ne pénètre pas leur esprit et leur
âme : ils s’en mocquent. En ce domaine comme en tant d’autres,
la responsabilité des parents est première, elle est irremplaçable et
de la plus grande importance pour les enfants.
L’éducation de
vos enfants est d’abord et surtout entre vos mains. Soit vous stimulez
vos enfants à désirer apprendre, à répondre activement à l’enseignement
donné, vous les faites vouloir apprendre, au besoin en les contraignant
et les punissant pour leur paresse, leur insouciance, leur inconstance;
vous ne les excusez pas, vous ne prêtez pas une oreille complaisante
aux histoires que certains sont très habiles à inventer, vous venez
nous voir directement s’il y a un problème, etc. Soit, au contraire,
vous les égarez sur des faux chemins, ou ne faites rien, ce qui revient
au même. Ils vont acquérir des vices au lieu de vertus. Encore une fois,
vos enfants requièrent votre fermeté pour qu’ils saisissent le sérieux
de leurs devoirs. Pour qu’ils deviennent vraiment intéressés dans leurs
études, ils doivent voir et sentir que cela est votre souci principal.
3) Soyez exigeants
avec vos enfants. S’ils ont reçu dix talents, ils doivent faire fructifier
les dix talents. S’ils en ont reçu cinq, ils doivent en produire cinq,
si c’est seulement deux, ils doivent en produire deux. Mais chacun doit
s’exercer à faire de son mieux.
4) Pour atteindre
ce but, il est nécessaire qu’il y ait communication fréquente et approfondie
entre les parents et les professeurs, et qu’il y ait une entente complète
sur ce qui est exigé des enfants. Soutenez les horaires de l’école,
les décisions, les punitions que vos enfants peuvent parfois mériter.
Ne vous permettez jamais, absolument, de critiquer une décision de l’école
devant vos enfants. Mais venez nous voir si une décision vous surprend.
Nous sommes toujours prêtes à répondre à toute question que vous pourriez
avoir. Il peut arriver en vérité que l’un de nous, professeurs, commette
une erreur. Mais jamais quelque-chose qui appartient à la vie de l’école
ne devrait être critiqué devant vos enfants.
5) Pour ce qui
concerne les devoirs à la maison, établissez un bon horaire, un temps
fixé. Ceci aide beaucoup. Procurez aussi à vos enfants un environement
de silence pendant ce temps. Mais il y a un point encore plus important :
ne laissez pas vos enfants complètement seuls pendant ses devoirs,
sauf les plus vieux. Parce qu’ils ont besoin de votre présence,
pas seulement ni toujours de votre présence physique, mais la présence,
encore une fois, de votre intérêt à leurs travaux. Quelques questions
quand ils se mettent au travail, peuvent encourager beaucoup :« Qu’est-ce
que tu as à faire ce soir comme devoir ou leçon ? Montre moi. Très bien! »
Donnez-leur des indications, des pistes, quelques idées pour organiser
leur travail; ou pour visualiser le plan d’une longue leçon. Aidez les
aussi à organiser leur temps, donnez-leur quelques limites pour faire
ceci ou cela. Offrez leur de revenir dans une heure, ou une demie heure,
ou quinze minutes, selon leur âge. Faites leur faire un petit test,
ou réciter. Quand leur moral est plus bas que d’habitude, offrez leur
de réviser la leçon avec eux. Ceci est plus important, j’ose le dire,
que de trouver un endroit silencieux, bien que cela soit nécessaire
aussi. Mais ce qui est le plus important, c’est de manifester en pratique
votre intérêt réel pour leurs études. Nous vous supplions donc de faire
quelque-chose en ce sens, et je vous promets de résultats merveilleux
qui dépasseront vos espoirs ! Un de ces fruits sera la rapidité avec
laquelle les devoirs à la maison seront accomplis. En effet, pour 75%
de nos filles, la longueur de leurs devoirs vient de leur manque d’intérêt
dans leur travail. Ceci est la première chose à corriger. De toute façon,
cela constitue la première étape dans le processus d’apprentissage.
Si on n’aime pas apprendre, on n’apprend pas, on ne se soucie pas de
retenir quelque-chose, et ceci est la triste réalité des écoles de nos
jours... Les professeurs répètent cent fois les mêmes concepts simples;
c’est toujours à recommencer, beaucoup d’enfants ne se rappellent jamais,
ils n’essayent pas de se souvenir d’un jour à l’autre. C’est comme si
nous avions affaire à des esprits morts. A la rigueur nous réussissons
à inculquer quelques réflexes, mais ce n’est pas cela penser, ce n’est
pas un travail intelligent, nous ne pouvons bâtir uniquement la-dessus.
Nos Soeurs et nos professeurs sont tous inquiets de cette inertie, cette
passivité. Comme nous le disions précédemment, le processus d’apprentissage
est intérieur et personnel. C’est, parents, en premier votre rôle, et
ensuite le nôtre, de le favoriser, d’inciter chacun de vos enfants à
travailler, de progresser sur le chemin de la connaissance et de la
vertu d’une façon toujours plus consciente et volontaire. Si nous abandonnons,
l’éducation des enfants n’est jamais accomplie. C’est très sérieux.
B.
Quelques vérités importantes concernant la formation de l’intelligence
2. La nécéssité
d’éduquer l’imagination
a) Puisque toute
connaissance nous vient par les sens qui nourrissent l’imagination, nous
devons être vigilants à propos de :
-premièrement
le genre d’images que nos sens vont confier à l’imagination. D’où
la nécessité de mettre nos enfants en contact avec des choses belles
et saines, et de les éloigner au contraire de toute laideur.
-deuxièmement la
quantité des images. Il y a un danger de « noyer » l’intelligence
par une surdose d’images. Puisque penser consiste à abstraire des
concepts universels à partir d’images, puis de faire des connexions
entre ces concepts en les mettant en ordre sous d’autres concepts, ou
en déduisant de nouveaux concepts à partir des premiers par un raisonnement
juste, il parait évident qu’une trop grande quantité d’images va en
quelque sorte désorienter et paralyser l’intelligence qui est noyée
par une imagination effrénée.
Puisque penser consiste
à abstraire des concepts à partir d’images, lorsqu’on est noyé dans des
millions d’images, on ne peut abstraire des concepts à partir d’un tel
déferlement d’images. Une telle avalanche d’images est contre nature,
inhumain. Notre illigence humaine a ses limites. Laisser nos enfants voir
trop de films, c’est les plonger dans ce monde d’images et de perception
sensible sans qu’ils aient le temps de les assimiler, c’est-à-dire de
penser.
Un abus d’images
peut donner à l’enfant l’illusion qu’ils sait beaucoup. C’est une erreur.
Il s’agit uniquement de perception sensible. Il n’y a pas de temps ni
de place pour le travail de l’intelligence, pour le raisonnement au niveau
des concepts, des idées universelles.
Et par ailleurs,
les images plaisent et attirent beaucoup, tandis que le travail intellectuel
est ardu. En favorisant cet attrait des sens, on affaiblit la volonté.
Le travail intellectuel est perçu comme étant de plus en plus ardu, presque
insupportable.
b) D’où la nécéssité
d’éviter de voir fréquemment des films. Ceux-ci remplissent l’imagination
de millions d’images. Voyez comment, après avoir vu un film, vous êtes
incapable de tout travail intellectuel. Regarder un bon film peut être
une bonne récréation une fois tous les deux mois. Mais si ce loisir devient
hebdomadaire, cela devient mortel, surtout pour des enfants qui doivent
apprendre à penser, à se servir de leur intelligence en comparant des
concepts abstraits, à trouver des liens logiques entre ces concepts, etc.
c) La raison pour
laquelle nous avons tant d’enfants incapables d’un effort de pensée, d’enfants
si oublieux et inconstants, est due au fait que leur intelligence est
si enchaînée par une imagination surexcitée ou totalement débridée, et
ceci est dû en partie aux films qu’ils regardent trop fréquemment.
Ils perdent le pouvoir de se concentrer et la forçe d’esprit, parce que
les films les distraient, les détournent de ce qui devrait être leur objectif
principal : leur formation intellectuelle. Les films surchargent
leur imagination en l’attirant vers des choses si différentes et nombreuses
que ces enfants perdent de vue la direction essentielle de leur vie. Cet
éparpillement de leur imagination produit nécéssairement une dispersion
de leurs pensées, et un affaiblissement considérable de leurs capacités
intellectuelles. Car la forçe en effet est le résultat de l’unité, de
la concentration de toutes les puissances au service d’un but majeur unique.
Les enfants « filmivores »
finissent par résister à tout travail intellectuel que ce soit. Ils sont
toujours à la recherche de plaisir, d’images, de plaisir des sens, de
trucs rapides, de recettes toutes faites d’avance. Pire encore :
ils ne s’émeuvent pas de penser de façon contradictoire. Ici on voit clairement
la destruction des intelligences en train de se produire.
d) Attention également
à denombreux jeux modernes qui déconnectent les enfants de la réalité.
Cela est tragique. Nous professeurs voyons clairement se produire cette
destruction des intelligences.
Combien il est évident
que lorsque l’homme va à l’encontre des lois de sa nature – rappelons
nous que la nature est en nous un principe d’opération – il se détruit
lui-même. Il devient de moins en moins humain, de moins en moins vertueux,
puisque être humain (ou vertueux) consiste à agir selon la droite raison.
Mais pour cela, il faut d’abord que la raison fonctionne, et fonctionne
droitement !
e) Inculquez aussi
en vos enfants un bon sens de l’observation. Parce que, selon Aristote,
« rien n’entre dans l’esprit qui ne passe d’abord par les sens »,
la formation de l’intelligence commence avec la discipline de l’imagination
qui elle-même présuppose l’acquisition d’un bon sens de l’observation.
Enseignez à vos enfants
à observer la nature, les oiseaux, les fleurs, les roches, les animaux,
les montagnes, les étoiles, et à découvrir les lois de la nature. Cela
est très sain, et servira à alimenter la pensée droite, basée sur la réalité
vraie et non sur la soi-disant réalité virtuelle; et cette observation
de la nature progresse à un rhytme humain, naturel.
f) Enfin comprenez
le rôle des jeux éducatifs, pour apprendre aux petits enfants comment
faire des liens, coordonner, penser, à leur petit niveau, faire des connections
logiques, encore au niveau des sens, mais néamoins préparant petit à petit
la voie à la pensée rationnelle.
3.
La nécésssité d’entraîner la mémoire.
L’homme a une mémoire
des sens, et il a aussi une mémoire intellectuelle. Cette dernière est
la puissance de retenir des concepts, des idées. Cette mémoire doit être
entraînée et disciplinée pour servir au progrès de notre connaissance
et compréhension des choses. Voici quelques considérations pratiques :
a) Le souvenir de
concepts, d’idées, est nécéssaire au progrès de la raison, de la connaissance.
Si nous devions sans cesse remonter aux premiers pas d’un raisonnement,
nous n’avancerions jamais. Nous n’acquèrerions pas de connaissances. On
comprend avec ceci combien il est si difficile d’avancer en classe dans
l’étude d’un sujet avec tant d’étudiants qui ne se rappellent pas les
leçons prédédentes. Si souvent, nous, professeurs, devons exposer plusieurs
fois un sujet à partir du premier pas, parce que les élèves ne se soucient
pas vraiment de se rappeler même les points les plus fondamentaux ! D’où
la nécéssité de faire retenir par les enfants certains concepts, idées,
de les faire mémoriser.
b) Nous devons être
très vigilants sur ce qu’ils mémorisent, parce que cela devient une partie
d’eux-mêmes. D’où l’importance majeure de les faire mémoriser des textes
beaux et profonds (des textes liturgiques, bien sûr, mais aussi p.ex.
des belles et profondes poésies, pièces de théâtre...). Leur intelligence
et leur sensibilité sont marquées profondément et formés par de tels textes.
Au contraire, nous écartons tout texte médiocre (une comédie peut être
acceptable, mais pas n’importe quelle comédie. Elle doit quand même apporter
une leçon d’humanité, sinon elle n’est que grossière, et donc dégradante).
c) Nous devons
garder un bon équilibre. Etre intelligent, formé, ne signifie pas
avoir mémorisé tous les détails de tout. (Même en un matière comme l’histoire,
l’accumulation de données contingentes ne doit pas faire oublier le rôle
de la raison : trouver des liens logiques, des constantes, des vues
générales, des explications). La mémoire est au service de l’intelligence;
elle est un outil nécéssaire. Deux excès doivent être évités :
‑ négliger
la mémoire sous le faux prétexte que ce qui importe, c’est de comprendre.
Parce que les enfants ne peuvent grandir dans la connaissance et la
compréhension des matières sans assimiler et retenir le contenu.
‑ la mémorisation
doit toujours être supportée par une compréhension profonde de ce qui
est mémorisé. Et inversément, une bonne mémoire aide les élèves à comprendre
et assimiler plus rapidement et aisément les nouvelles connaissances,
en aidant l’intelligence à faire des liens entre le nouveau, et ce qui
a déjà été vu. Comprendre un sujet consiste à saisir les réalités dans
leur profondeur. Nous devons nous rappeler que le but demeure l’acquisition
des connaissances, ce qui suppose que les enfants retiennent ces connaissances.
C’est ainsi que les connaissances deviennent partie de leur nature,
comme une seconde nature, qui, à son tour, sert de principe pour acquérir
de nouvelles connaissances, pour croître dans la compréhension d’un
sujet, un principe de nouvelles opérations intellectuelles.
(Suite dans le prochain
numéro)
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