Le
problème de la réforme liturgique
Introduction
Deuxième
partie : La Sainte Messe est un Sacrifice
Nous publions
ici la 2ème partie de l’étude de Mr. l’abbé François Laisney
qui nous fait comprendre avec beaucoup de pédagogie d’une part l’enseignement
traditionnel de l’Eglise sur la messe, et d’autre part, les erreurs des
modernistes.
« Les
Sacrifices du Seigneur », c’est par cette expression que commençait
la citation de St. Cyprien rapportée dans le dernier numéro du Communicantes
(p. 15). St. Cyprien parlait de l’unité de l’Église, et prenait la
Sainte Eucharistie comme preuve en la désignant par cette expression.
On trouverait beaucoup d’autres exemples. Donnons-en juste un : rapportant
un miracle eucharistique pendant une Sainte Messe qu’il célébra en l’an
251, le même St. Cyprien écrit : « sacrificantibus nobis – lorsque
nous offrions le Sacrifice ». [2]
Cela montre
combien la foi dans le caractère sacrificiel de la Sainte Messe est antique
et indiscutée. Qu’on est loin de cette « Cène du Seigneur ou Messe,
synaxe sacrée ou rassemblement du peuple de Dieu réuni, sous la présidence
du prêtre, pour célébrer le mémorial du Seigneur. » Comme cette première
version de l’article 7 de l’Institutio Generalis (introduisant
la nouvelle messe), de nombreux auteurs modernistes s’efforcent de présenter
la Messe comme un simple repas, et relèguent de côté son caractère sacrificiel
ou même le rejettent plus ou moins ouvertement. D’autres le réduisent
à la suite de Luther à un sacrifice seulement de louange et d’action de
grâce, en éliminant le caractère propitiatoire de ce sacrifice. Le nouveau
rite contient de nombreux changements et suppressions par rapport au rite
traditionnel qui vont dans le sens d’une diminution du caractère sacrificiel
et surtout propitiatoire de la Messe. Les principaux changements sont
énumérés dans la première partie du livre Le Problème de la Réforme
Liturgique.
Pour
aider le lecteur à mieux comprendre l’importance du caractère sacrificiel
de la Sainte Messe, nous allons d’abord voir ce qu’est le sacrifice, puis
comment la Messe est un sacrifice.
La
vertu de Religion
St. Thomas
d’Aquin nous enseigne que le sacrifice est un acte de la vertu de religion,
et même l’acte suprême de cette vertu. Qu’est-ce que la vertu de religion ?
C’est la vertu par laquelle nous honorons Dieu. Qu’est-ce que honorer
quelqu’un ? C’est rendre témoignage à l’excellence de cette personne.
1
‑ l’honneur rendu ici-bas
Pour mieux
comprendre l’importance de cette vertu, considérons qu’il y a sur terre
quatre sorte d’excellences humaines que nous honorons.
Les hommes
honorent l’excellence de la science : déjà à l’école on avait
l’habitude de donner des prix aux meilleurs élèves (excellente habitude
malheureusement rejetée par les méthodes modernes, mais qui aidait à apprécier
le savoir). Même encore maintenant on donne des prix Nobel aux scientifiques
qui ont fait des découvertes importantes pour la science ; on donne
des titres universitaires à ceux qui excellent : Monsieur le Professeur,
Docteur, etc. Dans la Sainte Église, le titre de Docteur de l’Église
a été décerné à certains saints dont la science a admirablement illustré
l’Église.
Les hommes
honorent l’excellence de la vertu, même au niveau naturel. Ainsi
on donne des médailles pour récompenser les services ou le courage de
certains. Supposez qu’une maison brûle, et que dehors une maman éplorée
indique que son bébé est dans telle pièce ; un pompier s’élance à
travers les flammes et sauve le bébé, il recevra une médaille pour reconnaître
l’excellence de son courage. C’est ce genre d’excellence que la Sainte
Église reconnaît dans ses Saints : en canonisant tel ou tel saint,
elle reconnaît l’excellence, l’héroïcité de ses vertus, et invite tous
les fidèles à l’honorer, c’est-à-dire à rendre témoignage à cette excellence.
Les hommes
honorent l’excellence de l’autorité : on présente les armes
au général, on honore un roi, une reine, et même un président de république.
Pourtant ils n’excellent pas tous en vertu (!), ni en science : ce
qu’on honore en eux, c’est l’autorité elle-même, c’est-à-dire le soin
et la garde qu’ils ont reçue du bien commun.
Il y a
une quatrième sorte d’excellence humaine à laquelle honneur est dû :
« tu honoreras ton père et ta mère. » Quelle est cette excellence
des parents ? Certes les parents ont par rapport à leurs enfants
une certaine science, ils leur apprennent à parler, et beaucoup d’autres
choses ; ils ont aussi une autorité et les enfants leur doivent obéissance,
mais ces caractères passent ; les enfants grandiront et pourront
dépasser leurs parents en science ; lorsque les enfants auront fondé
leur propre foyer, leurs propres parents n’auront plus cette autorité
sur eux ; et pourtant jusqu’à leur mort et même après les enfants
doivent honneur à leurs parents. L’excellence propre des parents sur leurs
enfants est l’excellence « d’origine » : les parents
sont à l’origine de la vie même de leurs enfants, c’est d’eux que les
enfants tiennent leur être. Quand les enfants sont petits ils tiennent
tout de leurs parents ; et au cours des ans ils accumulent une dette
envers eux qu’ils ne pourront jamais payer. Si les enfants méditaient
plus sur ce qu’ils doivent à leurs parents, ils les respecteraient plus.
Cette sorte d’excellence se retrouve à un niveau moindre chez tous ceux
qui nous ont fait du bien, que ce soit nos professeurs, ceux qui nous
ont donné de bons exemples, de bons conseils, nos bienfaiteurs, etc.
Mais pourquoi
honorer l’excellence ? Tout d’abord, en soi, honorer ce qui est
excellent est un bien honnête, parce que, une intelligence créée ne
pouvant pas tout connaître, il est raisonnable qu’elle s’applique à
connaître ce qui est plus excellent. C’est une vraie maladie du monde
moderne de voir tant d’hommes s’appliquer d’un côté à connaître les « trivia »,
choses sans aucun intérêt et aucune excellence, et d’un autre côté ignorer
non seulement au niveau naturel les chef-d’œuvre de la civilisation mais
même la Très Sainte Trinité et les vérités de notre sainte religion, choses
nécessaires pour le salut éternel.
De plus,
l’honneur est un dû dans la mesure où nous bénéficions de l’excellence.
Toute excellence d’une personne rejaillit en bienfait pour les autres :
ainsi la science médicale profite à tous, l’excellence du courage et de
la vertu est un exemple entraînant pour tous, l’autorité est pour le bien
commun, et il est évident que l’excellence des parents profite aux enfants.
Mais vous me direz, celui qui possède une excellence et en fait bénéficier
d’autres a donné du sien ; si c’est un don, pourquoi y aurait-il
un dû en retour ; s’il ne donne que dans le but de recevoir des honneurs,
n’est-ce pas de la vanité ? La réponse est simple : le donneur
donne par bonté, il donne parce que le bien tend à se diffuser. « Parce
que Dieu est bon, Il nous a créé, » dit St. Augustin. Mais si le
bénéficiaire est un être intelligent, il est bon pour lui de connaître
la vérité, en particulier sur le fait que ce qu’il possède, il l’a reçu
d’un autre ; il est bon pour lui d’apprécier la valeur du don reçu,
ce qui lui permet de mieux apprécier par là-même la bonté du donateur.
On saisit ici comment l’honneur mène à l’amour. Ainsi donc précisément
parce qu’un donateur veut le bien de celui auquel il donne, il désire
aussi que ce dernier reconnaisse la source de ce qu’il a reçu : déjà
au niveau humain la gratitude est une vertu, c’est un dû. L’honneur dû
aux parents est un dû très important, puisqu’il est l’objet du quatrième
commandement, mis par Dieu avant même le devoir très strict de respecter
la vie. Car si on ne respecte pas les auteurs de sa propre vie, quelle
vie respectera-t-on ?
Il y a
un vice dans l’excès de l’appétit d’excellence, c’est le vice de l’orgueil,
qui oublie que toute excellence créée n’est pas première, mais vient de
l’excellence de Dieu, source première de tout être et de tout bien. « Qu’as-tu
que tu n’aies reçu ? Et si tu l’as reçu, pourquoi te glorifies-tu
comme si tu ne l’avais pas reçu ? » (1 Cor. 4:7)
2.
L’honneur dû à Dieu
Maintenant
si nous élevons nos regards vers Dieu, nous trouvons en Lui toutes ces
quatre excellences, et au degré suprême, infiniment au dessus des créatures.
En
Lui se trouve la science suprême, Il connaît absolument tout, depuis
les plus lointaines galaxies, jusqu’aux plus petites particules, toutes
et chaque particules dans tout l’univers ! Il connaît tout le passé
et tout le futur, non seulement les événements extérieurs, mais encore
toutes les pensées et affections de tous les hommes depuis Adam et Ève
jusqu’au dernier homme à la fin du monde ; Il connaît toutes les
pensées et affections de tous les Anges. Et infiniment au dessus de tout
le créé, Il Se connaît Lui-même. Il est la source de toute connaissance,
et la Lumière qui illumine tout homme venant en ce monde.
En
Lui se trouve toute vertu. Il est le Tout-Puissant, la Sagesse même,
la Justice parfaite alliée à la Miséricorde la plus exquise, la Bonté
et la Sainteté même ; tout ce qu’Il fait est fait avec parfaite mesure,
beauté et pondération ; si on considère ses œuvres dans la nature,
Il est l’Artiste le plus exquis et sublime ; si on considère ses
œuvres dans les âmes, alors il est plus admirable encore : « Dieu
est admirable dans ses Saints ! » (Ps. 67:36). Il est la source
de toute vertu, et sans Lui nous ne pouvons rien faire.
En
Lui se trouve l’autorité suprême sur toute la création, et toute autorité
vient de Lui. Ceux qui exercent une autorité sur terre auront un compte
à rendre à son Tribunal, qui est suprême et sans appel. Il dit un mot,
et tout Lui obéit : « Il a dit une Parole et tout a été fait ;
il a donné un commandement et tout a été créé » (Ps. 148:5).
Enfin
Il est à l’origine de tout être ; Lui seul est par Lui-même,
Lui seul n’a pas reçu l’être. Tout autre être vient de Lui, dépend de
Lui pour l’existence et pour l’agir. « Tout don excellent, toute
donation parfaite vient d’en haut et descend du Père des lumières, chez
qui n’existe aucun changement, ni l’ombre d’une variation » (Jac
1:17). Les causes matérielles perdent ce qu’elles donnent : par exemple
une mère donne une pomme à son enfant, elle ne l’a plus. Les causes spirituelles
ne perdent pas ce qu’elles donnent : ainsi un professeur ne perd
pas la science qu’il communique à ses élèves. De plus les causes matérielles
ne sont pas supérieures à leur effet : la pomme est la même dans
la main de la mère et dans la main de l’enfant, la quantité de mouvement
qui passe d’un bolide dans un autre après un choc est la même, c’est la
« conservation de l’énergie ». Mais les causes spirituelles
possèdent selon un mode supérieur ce qu’elles donnent : ainsi l’architecte
qui met sur le papier les plans d’une maison ne les oublie pas une fois
écrits, mais il en possède l’intelligence dans son esprit, il en connaît
la raison d’être (alors qu’un ordinateur n’a aucune vraie compréhension
de ce qu’il pourrait écrire). Dieu étant la cause première de toute chose,
il s’en suit qu’Il n’a pas perdu le bien qu’Il a donné aux créatures,
mais bien plutôt Il possède tout le bien qu’on peut trouver dans les créatures ;
et de plus Il le possède selon un mode supérieur, transcendant. Si donc
on trouve quelque chose de bon et d’aimable dans une créature, on le trouvera
plus parfaitement en Dieu ; Il est donc suprêmement bon et digne
d’être aimé !
La lumière
de la Foi nous révèle encore plus la suréminente excellence de Dieu en
Lui-même. L’excellence d’origine se trouve d’une manière suréminente dans
le Père, « de Qui toute paternité au ciel et sur la terre reçoit
son nom », de Qui procède le Fils et le Saint Esprit sans commencement,
éternellement. L’Intelligence que le Père a de Lui-même est si parfaite
qu’Il exprime ce qu’Il est en Une Parole pleinement adéquate, Son Verbe,
le Fils égal au Père, Parole respirant l’Amour. L’excellence de la Vertu
de Dieu est sa Sainteté, son Esprit de Sainteté, l’Amour du Père et du
Fils. Et l’excellence d’autorité de la Trinité Sainte sur toute créature
se manifeste dans le plus grand miracle, la transsubstantiation :
par la parole du Fils éternel du Père, qui a pris chair dans les chastes
entrailles de la Vierge Marie par l’opération du Saint Esprit, le pain
et le vin sont changés en son propre Corps et Sang, et ce non seulement
lors de la dernière Cène, lorsque Notre Seigneur Jésus Christ prononça
ces paroles par Lui-même, mais aussi à chaque Messe lorsqu’Il les prononce
par le ministère du prêtre ! La Sainte Trinité mérite vraiment « tout
honneur et toute gloire dans les siècles des siècles ! »
De tout cela il ressort clairement qu’à la Sainte
Trinité est dû un honneur très spécial, l’honneur suprême, dû à l’excellence
suprême et absolue, et au Premier Principe de tout être et tout bien.
On appelle cet honneur : culte de latrie, ou d’adoration.
Aux Saints est dû un honneur relatif appelé culte de dulie, ou vénération.
Le culte
de Dieu est l’objet des trois premiers Commandements ; c’est un dû
qui prime tous les devoirs des hommes envers leurs semblables.
De l’accomplissement de cette obligation découlent d’abondantes grâces
pour nous aider à remplir nos obligations envers les hommes. En adorant
le Créateur, l’homme apprend à respecter son œuvre, d’où le respect des
parents, le respect de la vie et de sa transmission, le respect même des
biens matériels d’autrui et de sa réputation. Du non-respect des trois
premiers commandements découlent souvent le non-respect des autres :
si on ne respecte même pas le Créateur, qui respectera-t-on ? On
ne le voit que trop dans notre monde moderne.
Les
actes de la vertu de religion
Il y a
de nombreux actes de cette vertu. Les actes intérieurs sont les plus importants.
St. Thomas mentionne la dévotion et la prière. La dévotion est
la promptitude à tout faire pour l’honneur de Dieu. La prière honore
Dieu parce qu’elle reconnaît, avant même que Dieu n’ait donné quelque
chose, qu’Il en est la source et que dans son Amour Il prend soin de nous
et pourvoit à nos besoins. Remarquez que la dévotion ordonne les actes
de toutes les autres vertus à l’honneur de Dieu. Les vertus théologales
elles-mêmes prennent de cette vertu une « note » caractéristique :
en effet la Foi honore la véracité de Dieu et sa science ; l’espérance
honore la fidélité de Dieu et sa providence ; la Charité honore sa
Bonté infinie, digne d’être aimée plus que tout. Ne pas aimer Dieu plus
que tout, mettre sa fin ultime en autre chose que Dieu, c’est Le déshonorer.
De plus l’honneur rendu à Dieu nous aide et aide notre prochain à mieux
connaître et apprécier l’excellence de Dieu et de sa Bonté pour nous,
et donc à le connaître et à l’aimer. Il y a une influence mutuelle entre
cette vertu et les vertus théologales.
De plus
l’amour de Dieu non seulement se complaît en Dieu et se réjouit en Lui
(amour de complaisance) mais désire faire quelque chose pour Lui :
« Que rendrai-je au Seigneur pour tout ce qu’Il m’a donné ?
Je prendrai le Calice du Salut et j’invoquerai le Nom du Seigneur ! »
(ps. 115:4). On ne peut donner à Dieu quelque chose qu’Il n’ait pas, on
ne peut Lui donner que l’honneur, qui est un bien extérieur. C’est l’honneur
de Dieu, et c’est le bien de la créature, que de vivre entièrement pour
Lui, de L’aimer plus que tout et tout faire pour sa Gloire. Il n’est pas
surprenant que St. Thomas conclue son étude de la vertu de religion en
disant qu’en elle consiste la sainteté !
Mais cette
vertu ne consiste pas uniquement dans des actes intérieurs, car l’homme
n’est pas un pur esprit. Ainsi la louange, fréquente dans le chant des
psaumes, honore Dieu en paroles ; le serment, par lequel Dieu est
pris à témoin de la véracité d’une affirmation, honore la science divine
qui, connaissant le secret des cœurs, sait si nous disons vrai ou pas,
et jugera en conséquence. L’adoration, au sens limité de signes corporels
d’honneur tels que s’agenouiller, ou même la grande prostration telle
qu’au jour d’une profession religieuse ou d’une ordination, honore Dieu
en manifestant que nous nous considérons tout petits devant Dieu et même
rien en comparaison de Lui qui est Infini. Il faut mentionner les vœux,
les dîmes, les invocations du Nom de Dieu (par exemple dans les bénédictions
de l’Église), l’usage des choses saintes telles que les Sacrements, etc.
et le sacrifice.
Plusieurs
de ces actes de religions se retrouvent aussi dans les honneurs rendus
aux Saints et même aux hommes sur terre, ainsi la louange, ou la prière.
Mais il en est un qui est réservé à Dieu seul, parce qu’il exprime plus
spécialement l’excellence suprême : c’est le sacrifice.
Le
Saint Sacrifice de la Messe
Le sacrifice
est une certaine immolation d’une chose sensible faite à Dieu seul
pour rendre témoignage de sa suprême excellence et de notre totale soumission.
La vie étant le premier don que nous ayons reçu de Dieu et le plus fondamental,
car tous les autres le présupposent, le sacrifice manifeste que nous reconnaissons
Dieu comme Auteur de la vie en lui immolant une victime, ou quelque chose
qui soutient notre vie (par ex. le sacrifice de Melchisédech). Dès le
début de l’humanité, nous voyons des sacrifices tels que le sacrifice
d’Abel. Étant l’acte suprême du culte, rien d’étonnant que Dieu ait donné
maintes prescriptions précises à Moïse sur les rites des sacrifices de
l’Ancien Testament.
Le sacrifice
extérieur signifie le sacrifice intérieur, à savoir que l’âme s’offre
à Dieu par une soumission totale, c’est là le sacrifice d’adoration. La
reconnaissance intérieure que Dieu est source de tout bien passé (action
de grâce) et futur (demande, impétration) est partie essentielle du sacrifice
intérieur, signifié par l’offrande extérieure à Dieu (immolation) du bien
le plus fondamental, la vie d’une victime.
Les sacrifices
de l’ancien testament avaient une valeur de par le fait qu’ils signifiaient
le Sacrifice parfait du Christ à venir : ainsi le sacrifice de l’agneau
pascal ne tenait pas tant sa valeur du fait qu’il commémorait la Pâque
de Moïse, mais du fait qu’il annonçait la Pâque du Christ. Loin d’établir
une religion sans sacrifice, Notre Seigneur Jésus Christ a donné à son
Église le Sacrifice parfait, son propre Sacrifice de la Croix, que l’Église
offre tous les jours sur chaque autel. St. Thomas montre la supériorité
du nouveau testament sur l’ancien testament précisément en ceci :
dans l’ancien testament, les sacrifices ne faisaient que signifier et
annoncer le Sacrifice du Christ ; le Saint Sacrifice de la Messe
ne fait pas que signifier (commémorer) le Sacrifice de la Croix, mais
il est véritablement le Sacrifice du Christ : « On dit
‘le Sang de la nouvelle alliance’ parce qu’il nous est donné désormais
en réalité et non plus en figure. » [3] De même que le Corps du Christ est véritablement
et substantiellement présent tout entier en chaque hostie, et qu’il n’y
a pourtant qu’un seul Corps du Christ, de même chaque Messe est véritablement
un Sacrifice parfait, et pourtant il n’y a qu’un Sacrifice du Christ. [4]
On voit
ainsi combien l’esprit d’adoration, de respect est essentiel à la Messe,
précisément en tant que Sacrifice, acte suprême du culte, reconnaissance
du domaine souverain de la Sainte Trinité sur nous, ses créatures. De
bien des manières, le nouveau rite a mis l’accent sur le repas et a mis
de côté l’aspect sacrificiel de la Messe ; bien des marques d’adorations
ont été enlevées, ainsi que beaucoup d’expressions manifestant l’humble
soumission et le néant de la créature face à son Créateur.
Il importe
pour bien participer au Saint Sacrifice de la Messe de retrouver cet esprit
de sacrifice, esprit d’adoration, d’action de grâces et d’humble demande.
La Messe traditionnelle en est rempli et nourrit cet esprit en nous. Daigne
Notre Dame, qui fut présente au pied du Sacrifice de la Croix pleinement
unie au sacrifice de son Fils, nous aider à mieux nous unir à ce Sacrifice
parfait à la Sainte Messe ! "
(Nous
verrons dans le prochain bulletin la fin propitiatoire du sacrifice).
[2] De Lapsis, 25 (B.A.C. p. 189).
[4] Voir IIIa qu. 83 a. 3 ad. 1m.
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