Itinéraire
Spirituel
Par
Mgr Marcel Lefebvre
Chapitre
IV
Les
Anges
L’existence
des anges, leur perfection, leur activité, la chute des mauvais anges,
l’influence des anges auprès de nous et dans le monde, tout cela nous
est révélé par la sainte Écriture et la Tradition et rentre dans l’objet
de notre foi.
Combien grand est
le préjudice causé à nos âmes par l’oubli de ce monde spirituel des anges
plus nombreux que les hommes, plus parfaits qu’eux. L’influence des anges
bons ou mauvais sur nos âmes est beaucoup plus importante que nous le
pensons. Le seul fait que nous ayons un ange gardien qui veille sur nous
tout en contemplant la face de Dieu devrait nous encourager à converser
avec lui, à faire appel à ses secours pour qu’il nous aide à conquérir
la vie éternelle et à partager son bonheur.
Nous sommes plus
tentés de croire à l’influence des mauvais anges que des bons. Efforçons-nous
donc de pénétrer le monde merveilleux de tous ces esprits remplis de la
lumière et de la charité de l’Esprit saint, brûlants d’amour pour Dieu
et pour le prochain.
Ces esprits angéliques
ont une intelligence et une volonté beaucoup plus parfaites que les nôtres.
C’est pourquoi leur acceptation de participer à la gloire de Dieu ou leur
refus fut définitif. L’orgueil de ceux qui crurent atteindre cette gloire
par eux-mêmes les précipita en Enfer pour toujours.
Quelle leçon sur
la gravité du péché! Combien les pécheurs qui demeurent dans le péché
devraient trembler de frayeur et prendre la résolution de s’éloigner du
péché par la grâce et le sang de Notre-Seigneur, ce qui est possible tant
que nous sommes voyageurs ici-bas, mais qui ne le sera plus après la mort.
Aimons à vivre la
compagnie des saints anges. Tous les jours à la Préface de la sainte Messe,
l’Église nous invite à imiter les saints anges, chantant la gloire de
Dieu « Sanctus, Sanctus, Sanctus ... », chantant le « Gloria
in excelsis Deo ».
Les offices liturgiques
des Archanges saint Michel, saint Raphaël, saint Gabriel sont merveilleux
et tout célestes. Quelles belles leçons ils nous donnent par leur exemple
et leurs paroles! Rien n’est aussi céleste que l’Office des morts qui
nous confie aux anges : « Subvenite, angeli Dei »; « In
paradisum deducant te angeli » etc... Qu’elle est encourageante la
foi de l’Église dans les saints anges! Gardons-la précieusement et communiquons-la
aux fidèles.
Le fait de la chute
d’une partie des anges est trop important en lui-même et dans ses conséquences
pour ne pas nous y arrêter, car tous les hommes subissent les terribles
suites du péché des anges, et ainsi chaque âme est concernée par cet événement
pour son salut.
Le péché originel
et toutes ses conséquences désastreuses, l’action maléfique des démons
auprès de toutes les personnes humaines sont le résultat de cet abominable
péché des anges.
En quoi donc a consisté
ce péché des anges ?
Dieu veut à juste
titre que les créatures spirituelles intelligentes et libres méritent
le bonheur éternel et manifestent spontanément leur amour de Dieu en s’orientant
d’elles-mêmes sous l’influence de la grâce vers le bonheur auquel Dieu
les destine.
Les anges, beaucoup
plus parfaits que les hommes, ont percé avec une intelligence parfaite,
aidée de la grâce sanctifiante dont ils ont été pourvus à leur création,
le bonheur de la vision béatifique auquel Dieu les conviait. Un choix,
moralement obligatoire mais libre, leur était donc proposé. La proposition
de ce choix étant pour chaque ange aussi claire et lumineuse que possible,
devait recevoir une réponse d’adhésion instantanée et définitive. Tous
auraient dû répondre : « quis ut Deus? » – qui est comme
Dieu ‑ pour que nous ne L’aimions pas et ne nous soumettions pas
à cette proposition qui est la manifestation de la charité infinie de
Dieu pour ses créatures spirituelles?
Hélas, l’orgueil
et la complaisance en eux-mêmes d’un certain nombre d’anges les entraînèrent
vers un choix négatif. « Ce que nous sommes nous suffit, nous y trouvons
notre gloire ». Le résultat fut immédiat, ils perdirent la grâce
sanctifiante et furent précipités dans les ténèbres et le feu de la haine
de l’Enfer pour toujours, puisqu’ils demeurent toujours dans leur mauvais
choix.
Cette proposition
de ce bonheur suprême se fit-elle par l’intermédiaire de Notre-Seigneur
Jésus-Christ, par l’adhésion au mystère de l’Incarnation? C’est vraisemblable,
car comment concevoir que Notre-Seigneur soit le Roi des Anges sans qu’ils
aient consenti à son règne? Ainsi se conçoivent mieux toutes les expressions
de l’Écriture : « Rex coeli et terrae – Roi des cieux et de
la terre », « Rex universorum – le Roi universel », « Data
est mihi omnis potestas in coelo et in terra – Tout pouvoir m’a été donné
aux cieux et sur la terre », « Omnium creaturarum dominatum
obtinet essentia sua et natura – il obtient par son essence et sa nature
la domination sur toutes les choses créées » (fête du Christ-Roi).
La lettre de saint Paul aux Colossiens (Col. 1 : 3-23) est explicite
sur le règne de Notre-Seigneur sur les anges.
Ainsi s’explique
aussi la haine des démons contre Notre-Seigneur.
La réalité de l’existence
des myriades d’esprits angéliques et aussi – hélas! – de myriades de démons,
leur influence voulue par la Providence de Dieu pour les bons anges et
permise pour les mauvais anges auprès de nous, ne peut pas nous laisser
indifférents et doit intervenir dans nos jugements à propos de la vie
spirituelle et même à propos des événements de la vie quotidienne.
La pensée des saints
anges devrait nous être coutumière et préparer ainsi la réalité céleste,
de même que nous devons tout faire pour éviter la mauvaise influence des
démons.
Notre attitude vis-à-vis
des démons, soit dans notre vie intérieure personnelle, soit dans notre
activité pastorale, doit être conforme à la pensée et à la Tradition de
l’Église. A ce sujet, aimons à relire les prescriptions du Rituel qui
nous donne de précieux et sages conseils.
L’influence accrue
des démons en ces temps de désordre, l’abandon de la pastorale des exorcismes
de la part du clergé progressiste, provoquent un afflux de demandes de
secours auprès des prêtres de la Tradition.
Notre attitude dans
ce domaine sera d’une grande prudence et sagesse : d’abord éliminer
les cas qui relèvent de la médecine; exiger la pratique religieuse traditionnelle,
spécialement l’assistance fréquente au saint sacrifice de la Messe, le
sacrement de pénitence, la récitation du Rosaire, la prière à saint Michel
Archange, puis le petit exorcisme de saint Michel, enfin, rarement, le
grand exorcisme.
Au cours de ces exorcismes,
ne jamais poser de questions indiscrètes, ne jamais entrer en conversation
avec les démons, mais leur commander impérativement à la manière des prières
du grand exorcisme.
Les démons sont très
intelligents et fourbes, ils excitent la curiosité, pour en arriver lentement
mais sûrement à envoûter le prêtre exorciste et finissent par lui faire
accomplir leurs volontés en imposant des actes généralement bons, pour
en arriver à des actes mauvais lorsqu’ils dominent les volontés.
Il faut donc refuser
tout dialogue; c’est ainsi que Satan a perverti Ève qui a accepté le dialogue.
Sachons limiter cette
pastorale, qu’elle ne devienne pas envahissante, c’est encore un des buts
des démons pour nous empêcher d’accomplir notre apostolat.
Cette pastorale doit
concourir à notre sanctification et non pas nous troubler et nous attirer
au péché.
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