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Communicantes: August - October 2002
 

La Canonisation de Mgr Jose Maria Escriva de Balaguer Est-elle Infaillible?

Abbé Peter Scott, extrait du magazine « The Angelus », du district américain, juillet 2002

Il est certain que le grand nombre des canonisations effectuées par le Pape actuel nous étonne, voir nous inquiète, surtout parce que les règles traditionnelles contenues dans l’ancien code de Droit Canon, qui avaient pour but d’empêcher toute possibilité de canoniser par erreur une personne dont la foi et la vie n’auraient pas été parfaitement exemplaires, toutes ces règles traditionnelles, disons-nous, ont été balayées, et remplacées par des règles moins exigeantes. Il faut dire que jusqu’à présent, il s’est agi uniquement de saints ayant vécu avant le concile Vatican II, des catholiques dont la vie fut très sainte. Mais le projet de la canonisation du fondateur de l’Opus Dei est très différent. Car c’est lui qui a anticipé, 30 ans avant le Concile, une théologie nouvelle, révolutionnaire, de l’état laïc, et qui a accepté le principe du pluralisme, acceuillant dans l’Opus Dei des hommes de toute foi et de toute religion1. Cet indifférentisme ne peut être considéré, sous quelque critère traditionnel que ce soit, comme un exemple de sainteté.

Les théologiens acceptent comme étant théologiquement certain que l’église est infaillible dans le canonisation solennelle des saints, contrairement à la béatification des bienheureux2. La raison en est que la canonisation n’est pas seulement une permission d’honorer un saint, comme c’est le cas de la béatification. C’est une définition, et un commandement, faits par le souverain pontife avec l’usage de sa pleine autorité, et qui donc lie les catholiques. C’est quelque-chose de semblable à une proclamation de la foi, mais ayant pour objet la gloire d’un saint au ciel.

Cependant, tous les saints canonisés ne sont pas déclarés comme tels par l’Église. Dans les dix premiers siècles de l’histoire de l’Église, les papes donnaient simplement leur approbation à la vénération des saints et des martyrs par les fidèles. Ils sont aujourd’hui considérés comme des saints. Mais puisqu’il n’y a pas eu dans leur cas de procès solennel de canonisation, l’autorité et l’infaillibilité entière de l’Église ne sont pas engagées pour de tels saints. On doit donc dire que ce n’est pas le fait qu’une personne soit appelée un saint qui engage l’infaillibilité, mais la déclaration et la définition solennelle par le Souverain Pontife liant les catholiques. C’est de ceci que dépend la réponse à la question de l’infaillibilité de la canonisation de Mgr Escriva. Si le décret définit formellement et oblige d’accepter sa sainteté, alors il sera infaillible, en dépit des défauts dans les procès pour canonisation des saints qui existent depuis Vatican II. Si cependant le décret de canonisation n’était pas solennel, et ne contenait pas des expressions comme « nous définissons », et « nous commandons » la vénération de ce saint, alors ce décret ne serait pas infaillible, à l’instar de l’approbation de la vénération des saints dans les premiers siècles de l’Église. La même distinction s’applique au concile Vatican II, qui, en refusant de définir clairement la doctrine, a refusé d’utiliser l’autorité infaillible de Magistère extraordinaire qu’il aurait pu utiliser pour condamner des hérésies.

Surgit alors la question de savoir, dans l’hypothèse d’une canonisation accomplie solennement et selon les règles, si nous sommes tenus de vénérer ce saint particulier comme un patron et un modèle. Saint Thomas dit que la vénération que nous rendons aux saints est « celle par quoi nous croyons qu’ils partagent la gloire des saints »3. L’objet de la canonisation est ainsi la vision que le saint a de Dieu au ciel et seulement indirectement la sainteté de sa vie et sa valeur comme modèle. Ces dernières ne sont donc pas l’objet de la définition infaillible par le pape, et, bien que, normalement, on ne les met pas en doute dans un saint canonisé, dans le cas particulier dont nous parlons, il semblerait possible de les mettre sérieusement en doute, tout en acceptant que ce saint canonisé est au ciel. Ainsi nous pourrions croire que Mgr Escriva est un saint du ciel (ce qui d’ailleurs n’est pas difficile à admettre pour un prêtre, étant donnés son état d’esprit conservateur, sa piété authentique, sa réception fréquente des sacrements) sans cependant accepter d’aucune façon le pluralisme et le laïcisme qu’il a favorisés.

 


1. Cf. « Opus Dei : A Strange Pastoral Phenomenon, » The Angelus, Sept. 1995

2. Cf. Zubizaretta, Theologia Dogmatico-Scholastica, Vol. I, §§ 487‑489.

3. Quodlibet 9, a. 16, in Zubizarreta, op. cit.

 

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