Convictions

English
Juillet - Septembre 2005, No. 2
 
Éditorial
Lénine au Canada
Par M. l`abbé Patrick Girouard FSSPX


Chers lecteurs:

M. l`abbé Patrick Girouard

 

Nous avons tous entendu parler de Vladimir Illitch Oulianov, dit Lénine, chef de la Révolution Bolchevique de 1917 en Russie. Mais ce que tous ne savent peut-être pas est qu’une des premières mesures prises par le nouveau régime, fut de voler les biens ecclésiastiques à travers tout le pays. Il ne fut toutefois pas le pionnier en cela. Les Princes Protestants d’Allemagne, les Rois et Reines Anglicans d’Angleterre, les Révolutionnaires Laïcistes de France et d’Italie, lui avaient déjà pavé la voie. Leur « argument » était que les terres et édifices ecclésiastiques étaient le fruit du travail du peuple, et qu’ils devaient donc retourner au peuple, c’est-à-dire à l’État, représentant le peuple. Bien sûr, ce n’était là que mensonge et démagogie. En effet, le résultat direct des confiscations fut que le peuple, qui jusque là avait prié dans les églises, et avait bénéficié de la charité de l’Église, charité permise en bonne partie par les revenus des terres du clergé, en fut désormais privé. La richesse terrienne et les édifices furent distribués aux amis des spoliateurs, ou utilisés par les États eux-mêmes. Les monastères et les églises furent donc transformés en palais, bureaux gouvernementaux, musées, théâtres, entrepôts, voire en granges ou étables, quand ils n’étaient pas simplement détruits. Les paroisses et les diocèses disparurent, le clergé et les fidèles étant décimés ou se cachant. Il y a maintenant plusieurs années que Lénine est mort. Mais quand on regarde ce qui se passe dans l’Église Catholique canadienne de nos jours, on est en droit de se demander si ce diable d’homme n’est pas revenu nous hanter avec sa peste communiste!

Oui! Je veux parler de tous ces monastères, couvents, églises qui sont à vendre au Canada. Soit parce que certains diocèses ou congrégations religieuses ont besoin d’argent pour payer les victimes d’abus sexuels, soit parce qu’il n’y a plus assez de fidèles pour défrayer les coûts d’entretien des édifices. Un douloureux exemple du premier cas est celui du diocèse de Saint-Georges à Terre-Neuve. En effet, le diocèse annonçait en mai dernier son intention de vendre TOUS les édifices qui lui appartiennent, afin de pouvoir indemniser financièrement les 39 victimes du Père Kevin Bennett, prêtre du diocèse, condamné à la fin des années 1990 pour abus sexuels. St-Georges fut donc le premier diocèse du Canada à se mettre sous la protection de la Loi de la Faillite. «Tout est à vendre… a déclaré S.E. Mgr Douglas Crosby, Évêque de Saint-Georges, …toutes les églises, tous les presbytères, et toutes les missions.» 150 propriétés sont concernées. (Qu’arrivera-t-il des paroissiens et des prêtres?). On se souvient par ailleurs que les Oblats de Marie Immaculée sont aussi en faillite, pour le même genre de raisons. (Et nous ne parlerons pas des nombreux diocèses des États-Unis qui sont en faillite, soit à cause des sommes qu’ils ont dû verser aux victimes d’abus, soit en raison de mauvaise gestion, etc.). Les cas reliés aux abus ont reçu beaucoup de publicité dans les média. Mais un autre genre de destruction a lieu de manière plus discrète, spécialement au Québec.

 
Vladimir Illitch Lénine
 
Vladimir Illitch Lénine
1870-1924

Comme nous le savons, le Québec fut – et même demeure – la seule Province canadienne où les Catholiques formaient la majorité de la population. Bien sûr, aujourd’hui il s’agit surtout de «Catholiques de nom». Mais jusque vers la fin des années 50, plus de 90% des Québécois fréquentaient l’église régulièrement. Cela veut dire qu’un nombre élevé de vocations et de fidèles requéraient un nombre proportionnel de couvents, d’églises, et d’écoles. Et ils en avaient en effet un nombre impressionnant! Mais, depuis la Révolution de Vatican II, la majeure partie des Québécois ont perdu la Foi, et ont cessé de fréquenter l’église. Ils ont donc cessé de supporter leurs paroisses et diocèses. Un exemple frappant de ce phénomène: En 1998, Limoilou comptait 11 paroisses. En 1999, elles se virent regroupées en 3 paroisses, car depuis quelques années, le nombre de fidèles n’en justifiait plus onze! (Cf. Atlas Historique du Québec, «Les Paroisses»). Comme on peut le constater, 30 ans seulement après le Concile (terminé en 1965), ses effets étaient déjà terribles, mais en 2005, ils sont tout simplement désastreux! C’en est au point où la Commission parlementaire de l’Assemblée nationale du Québec a entrepris en septembre dernier une série de consultations publiques au sujet du futur des biens ecclésiastiques. Que devrons-nous faire avec tous ces couvents et ces églises qui ont besoin d’argent pour leur entretien? L’Église Catholique n’a plus les ressources suffisantes pour prendre soin de centaines d’édifices. Alors que devons-nous faire? Les entretenir? Les détruire? Les vendre? En changer la vocation? Telles sont les principales questions que la Commission parlementaire posera au public à travers le Québec au cours des prochains mois. L’argument est que ces édifices furent construits par le peuple, et que le peuple doit donc décider de leur avenir. Tiens! Tiens! Cela ne nous rappelle-t-il pas quelque chose? N’était-ce pas la raison mise de l’avant par les spoliateurs de biens ecclésiastiques pour justifier leurs actions? La vraie question ne devrait-elle pas plutôt être: Les Catholiques les ont construits, et seuls les Catholiques doivent décider de leur sort?

Bien sûr que ça devrait! Mais le problème est justement que les Catholiques ne sont plus assez nombreux! C’est ainsi que le clergé et beaucoup de fidèles en sont venus à demander au gouvernement du Québec de sauvegarder ces édifices comme faisant partie du patrimoine culturel de la Province. Voilà pourquoi la Commission culturelle du Parlement essaie de trouver un consensus au sein de l’ensemble de la population québécoise. Et le clergé y participe activement. Par exemple, Son Éminence Monsieur le Cardinal Jean-Claude Turcotte, Archevêque de Montréal, y est allé d’une proposition à tout le moins étonnante: Que le Gouvernement du Québec décrète un moratoire sur tous ses projets de construction ayant un but culturel, social, administratif, etc., et qu’il se serve plutôt des édifices ecclésiastiques! Ces immeubles pourraient ainsi être utilisés comme bibliothèques, salles de concert, ou même par le «Cirque du Soleil»! Discutant de la question avec le journaliste Pierre Maisonneuve, le 21 septembre dernier, lors d’une émission à la radio de Radio-Canada, le Cardinal a reconnu que la transformation, en 2002, de l’église St Jean de la Croix en condominiums avait été mal perçue par la population. Mais il a ajouté que certaines «reconversions» étaient satisfaisantes, et cita les cas du couvent des Sœurs de Jésus et de Marie (300 chambres!) qui fut vendu à l’Université de Montréal, et celui du couvent des Sœurs Grises, vendu à l’Université Concordia. Il a aussi déclaré qu’il préférait quand même que les églises soient vendues à des communauté religieuses (Ah! Finalement, un discours catholique!), telles que des Églises Protestantes (Oops! Notre espoir était vain!), ou à des organismes d’aide aux pauvres. Rappelons, pour illustrer les propos de Son Éminence, que l’église St Augustin a effectivement été vendue à une secte Protestante en 2003 (alors que son magnifique presbytère a été transformé en garderie), et que le « Chic Resto-Pop », une cuisine pour les pauvres, est installé dans une église désaffectée. Radio-Canada affirme aussi que 123 des 246 paroisses de Montréal sont incapables de pourvoir à l’entretien de leurs églises. On parle exactement de la moitié! C’est pourquoi Mgr l’Archevêque veut que le Gouvernement du Québec prenne en charge ses églises et couvents vides, de façon à préserver l’héritage culturel du Québec… Il est en train de demander à l’État de refaire ce que fit Lénine en Russie! Et le Québec n’aura même pas à disperser le clergé et les fidèles, car Vatican II s’en est déjà chargé! Ce qui est de la plus haute importance, pour le Cardinal, est la préservation matérielle des édifices ecclésiastiques, même si cela implique que l’Église devra s’en départir. Car ne serait-ce pas triste que ces attraits touristiques soient à jamais perdus par manque d’entretien?

convent now a part of a university
Le Couvent vendu par les Sœur Grises
à l'Université Concordia à Montréal

Oui, je suis tout à fait d’accord pour dire que ce serait bien triste de voir les fruits des sacrifices de nos ancêtres se dégrader et devenir des tas de pierres. Mais je crois que le Cardinal devrait se demander pas tellement «comment faire pour entretenir nos bâtiments inutilisés?», mais plutôt «Pourquoi nos églises et monastères sont-ils vides?». En tant qu’Archevêque Catholique du plus gros diocèse du Québec, le Cardinal Turcotte ne devrait-il pas frissonner en pensant à la multitude des âmes ayant déserté le bercail de Notre Seigneur? Ne devrait-il pas s’asseoir avec ses conseillers, et rechercher honnêtement les causes ayant amené la majorité des Québécois à abandonner la Religion de leurs pères? Aucun Chef de la Direction d’une grosse entreprise, pourvu qu’il soit un peu responsable, n’aurait attendu plus de quelques mois avant d’essayer de corriger les problèmes de sa compagnie. Mais ce n’est pas le cas de nos ecclésiastiques modernistes… S’ils agissaient en vrais Pasteurs, ils accepteraient la vraie, bien que douloureuse, réponse: La « réforme » de Vatican II a produit la perte de la Foi chez les Catholiques, et c’est pourquoi les Évêques n’ont plus, aujourd’hui, assez d’argent pour entretenir leurs bâtiments. Après cet infâme Concile, un esprit d’aveuglement s’est emparé du clergé. Ils ont mis de côté la Tradition de l’Église, et l’ont remplacée par une insipide doctrine n’ayant plus rien de surnaturel, de mystérieux, ou de rigoureux. Dimanche après dimanche, les fidèles furent exposés à la proclamation de la vieille Utopie communiste du Paradis sur terre, Paradis qu’on atteindrait par le travail «social» et la solidarité humaine. Cette doctrine terre à terre fut aussi réfléchie dans la liturgie: Le Saint Sacrifice fut remplacé par un repas de communauté, incluant le fameux « don de Paix » alors que des jeunes échevelés s’occupaient du spectacle, avec leurs guitares et batteries. Et ce qui devait arriver arriva: Les matins du dimanche, les gens ont préféré faire la grasse matinée, puis aller prendre une bonne bouffe au restaurant, là où ils étaient certains de ne pas avoir à serrer la main à des inconnus au milieu du repas. Ils ont aussi préféré se déplacer au théâtre ou à la salle de concert pour assister à un vrai bon spectacle, et ne plus avoir à subir la musique d’amateurs performant dans une église. Puis, il se sont aussi dit que, puisque pour être sauvé il n’y avait plus qu’à aider au soulagement de la famine en Afrique, dorénavant ils enverraient leurs dons directement à Oxfam, Vision Mondiale, et autres organismes du genre. La majeure partie des gens ont une certaine logique, et ils ne sont pas stupides comme le croyait le clergé moderniste. Ils vont aller là où ça leur convient le mieux. Ils veulent de la qualité, de la beauté, quelque chose de grand. Or, chers Évêques, voici ce vous avez fait: Vous avez dépouillé l’Église de sa glorieuse doctrine et de sa magnifique liturgie, et vous l’avez rendue «plate». Les gens qui s’y sont ennuyés ne retourneront jamais à un mauvais spectacle. Et les salles seront vides, et la compagnie de spectacle fera faillite. Est-ce si difficile à comprendre? Soyez assurés de nos prières au Saint Esprit, afin que vous puissiez «reconnaître l’arbre à ses fruits», et abandonner cette désastreuse idéologie de Vatican II. Revenez à la Tradition! Offrez de nouveau au peuple ce dont il a un si grand besoin: le vrai Évangile de Notre Seigneur Jésus Christ, et Son Vrai Sacrifice! ?


Home | Contact | Mass Centres | Schools | Pilgrimages | Retreats | Precious Blood Residence
District Superior's Ltrs | Superor General's Ltrs | Various
Newsletter | Eucharistic Crusade | Rosary Clarion | For the Clergy | Coast to Coast | Saints | Links

English