C’est samedi. Vous retournez à la maison après un peu de magasinage.
C’est une belle journée, et votre seul désir est d’arriver,
de vous asseoir confortablement, et de relaxer. Vos trois
plus vieux, assis à l’arrière de la voiture, sont eux aussi
fatigués, et votre promesse d’un cornet de crème glacée a
fait long feu. Ils ont recommencé à se chamailler et à crier.
Exaspéré, vous leur criez qu’ils peuvent oublier la crème
glacée, «et à jamais!» Ils se calment durant… soixante
longues secondes… Vous saviez dès le départ que cela ne durerait
pas… Vous continuez à conduire, essayant de d’oublier vos
petits monstres. Après un certain temps, vous voyez que les
autres conducteurs agissent étrangement. Mais, que se passe-t-il
donc? Soudainement, vous devez freiner à fond. Les enfants
deviennent silencieux. Vous entendez alors une sirène, et
un fort klaxon. Wheee! Wheee! Wheee! Honk! Honk! Honk! Ça
doit être un camion de pompiers! Mais où est-il? Ah! Oui!
Là-bas, à droite! Bientôt, tel une flamme chassée par le vent,
le gros véhicule rouge passe en vitesse devant vous, et vous
pouvez recommencer à rouler. C’est à ce moment-là que vous
réalisez avec horreur que vous avez oublié le gâteau pour
l’anniversaire de votre belle-mère. Oh, pétard! «va me
tuer!» vous dites-vous, en pensant à la réaction de votre
femme, surtout que le gâteau était LA raison principale de
votre sortie. C'est la faute des enfants, bien sûr, car ils
étaient tellement excités au centre d'achats. Vous êtes en
colère. Envers les enfants. Envers votre épouse, incapable
de faire elle-même un petit gâteau de rien du tout. Envers
vous-même, parce que vous n'êtes pas assez ferme. Voici que
vos enfants redeviennent à nouveau silencieux, car vous venez
de crier: «J’aurais dû me faire moine!». Ils se regardent,
interdits. Ils commencent à glousser. Ils n'en peuvent bientôt
plus de se retenir, et sont pris d'un fou rire tonitruant.
Vous pensez: «! Si seulement je n’avais pas à endurer tout
cela!» .Cinq secondes plus tard, votre rêve est devenu
réalité. En effet, juste comme vous rouliez sous un viaduc,
un énorme fragment du pont tombe et écrase votre voiture.
Alors
que vous vous dirigiez vers ce viaduc, vous étiez loin de
savoir que chaque tour de roue vous rapprochait de votre dernier
moment sur cette terre. Sous le pont, vous n’avez même pas
eu le temps de réaliser ce qui vous arrivait ainsi qu’à vos
enfants. Vous ne le saviez pas mais, cet après-midi là, Dieu
vous appelait tous les quatre à passer en jugement. Quand
on pense que s’il n’y avait pas eu ce camion de pompiers pour
vous bloquer la voie pendant quelques instants, vous seriez
passés sous le viaduc avant qu’il ne s’écroule! Mais voilà!
Il y avait un camion de pompiers… Parce que, voyez-vous? Dieu
avait organisé une petite conférence avec certaines gens,
et vous étiez au nombre des invités. Terrible? Pas si vous
étiez préparés, en état de grâce… Si ce n’était pas le cas,
j’ai l’impression que vous allez vous ennuyer des hivers de
votre pays!
M.
l’abbé! Comment osez-vous plaisanter sur un sujet pareil!
Ne savez-vous donc pas qu’un tel drame est véritablement survenu
à Montréal, le 30 septembre dernier? Je sais! Je sais! Et
je sais aussi que de telles tragédies se produisent tous les
jours dans le monde entier! Cela nous donne autant de raisons
pour réfléchir… Cela pourrait arriver à chacun de nous. En
fait, nous connaissons probablement tous quelqu’un qui est
décédé de manière accidentelle. C’est la vie… Notre Seigneur
nous a avertis: «Assurez-vous de veiller et de prier. Car
vous ne savez pas quand le temps viendra.» (Marc 13, 33).
Il a d'ailleurs répété cet avertissement à plusieurs reprises
dans l'Évangile. Mais que faut-il faire pour pouvoir plaire
à Dieu au moment de notre mort? Telle est la vraie question.
Le problème, du moins pour les Catholiques de Tradition, ne
devrait pas être simplement d'éviter l'Enfer, mais plutôt
de faire la volonté de Dieu. Il s'agirait donc de se demander:
Quel est le plan de Dieu à mon égard?
La
réponse à cette question des plus importantes dépend d’un
fait merveilleux, mais souvent oublié: Dieu habite en nos
âmes! Nous avons en effet reçu la grâce sanctifiante au
Baptême! Nous avons les sacrements, qui nous permettent de
la garder et de la faire croître ou même retrouver! Notre
Seigneur lui-même nous l'a révélé: «Si quelqu’un m’aime,
il gardera mes paroles, et mon Père l’aimera, et nous viendrons
à lui, et ferons notre demeure en lui.» (Jn 14, 23). Nous
sommes en effet les membres vivants du Corps Mystique du Christ.
Il est notre Tête. Il est la Vigne, et nous sommes les branches,
et sans Lui nous ne pouvons rien faire qui nous fasse mériter
le Ciel. Dans son livre ‘Le Christ idéal du Prêtre’,
Dom Colomba Marmion, OSB, explique cette habitation du Christ
en nous. Il dit que le Christ agit en nous et à travers nous.
Il cite st Augustin qui parle de l'union entre le Christ et
son Corps Mystique, l'Église: «Ils sont deux en une seule
chair; comment ne seraient-ils pas deux en une seule voix?
…C’est l’Église qui intercède dans le Christ, et le Christ
qui intercède dans l’Église; Le Corps est un avec la Tête,
et la Tête est une avec le Corps.» L'Abbé bénédictin continue
en disant que, même si la satisfaction du Christ est et demeurera
toujours surabondante pour expier tous les péchés, c'est néanmoins
sa volonté que son Corps Mystique prenne part à cette expiation,
comme le dit st. Paul lui-même: «Je me réjouis de mes souffrances
pour vous, et je complète en ma chair ce qui manque aux souffrances
du Christ, pour son Corps, qui est l’Église.» (Col. 1,
24). Dom Marmion ajoute: «Ce qui est vrai de l’expiation,
est vrai aussi pour notre obligation d’adorer, de louer, et
de remercier Dieu. Nous devons continuer et ‘compléter les
louanges que le Christ rendait au Père’.» Telle est la
volonté de Dieu: Que nous devenions de bons instruments du
Christ, de façon à ce qu’Il puisse continuer à souffrir, expier,
adorer, remercier, implorer, par nous et à travers nous.
Il existe une telle union entre l'âme en état de grâce et
le Christ que, quand celle-ci prie et mérite, elle le fait
à travers Notre Seigneur: «Christum Dominum Nostrum».
St Paul nous dit que c'est le Saint Esprit qui meut l'âme
à la prière, aux bonnes œuvres, et à une plus grande union
avec Dieu: «parce que vous êtes des fils, Dieu a envoyé
l’Esprit de Son Fils en vos cœurs, vous faisant dire: Abba,
Père!» (Eph. 3, 14). La réalisation que nous sommes si
étroitement unis à Dieu par la grâce nous fait ployer les
genoux et adorer Son Amour et Sa Miséricorde!
Cette
doctrine n’est pas nouvelle. Déjà au 17ème siècle
le saint Cardinal de Bérulle enseignait que la présence du
Christ est ce qui nous rend capables de remplir nos devoirs
vis-à-vis de Dieu. Il est le parfait Adorateur et Médiateur,
et c'est seulement par et à travers Lui que notre prière,
notre adoration, notre amour, et notre action de grâces peuvent
être agréables à la Divinité. Nous comprenons maintenant que
l'habitation de Dieu en notre âme a deux implications: 1-Notre
Seigneur Jésus-Christ, Médiateur et Adorateur parfait au Ciel
et au Saint Sacrement, l’est aussi à travers nous, en nous,
et par nous. 2-C’est seulement par Lui, avec Lui, et en Lui
que nous pouvons rendre nos devoirs à Dieu («Ipsum, et
cum Ipso, et in Ipso…»). C'est pourquoi il nous faut éliminer
de notre vie, de notre cœur, et de notre esprit, tout obstacle
à l'action du Christ en nous et par nous. Nous devons nous
attacher à Lui, Le connaître et imiter Ses vertus, et Le faire
prier et travailler à travers nous. Quelle grande source de
motivation et de consolation! Lorsque nous offrons la Messe
avec le prêtre, que nous prions, méditons, visitons les délaissés,
faisons l'aumône, souffrons, pardonnons, etc., le Christ fait
toutes ces choses par nous, à travers nous, et avec nous!
Tout prend ainsi une nouvelle signification! Nous ne sommes
jamais seuls, du moment que nous sommes en état de grâce!
Maintenant nous comprenons pourquoi nous devons être attentifs
à ce que nous faisons: Nous devons faire de notre mieux pour
que le Christ rayonne à travers nous! Nous devons dire, avec
st Jean Baptiste: «doit croître, et il faut que je diminue»
(Jn 3, 30). Nous devons nous efforcer de faire régner le Christ
dans toute notre personne. En d'autres mots, nous devons «d’abord
le Royaume de Dieu et sa justice» (Mt. 6, 25). Telle est
la volonté de Dieu: Que Son règne arrive, dans nos cœurs!
Mais
cette inhabitation et cette action du Christ en nous n’est
pas tout! En effet, le plus grand désir de Dieu est de nous
accorder la grâce d’union avec Lui! St Jean de la Croix explique
comment cela peut se faire: Si nous devenons entièrement détachés,
au moins dans nos cœurs, de tout ce qui n’est pas Dieu, alors
Il s’unira à notre âme, de façon à ne faire quasiment qu’un
avec elle. Cela sera très proche de ce qu’est la Vision Béatifique.
C’est ce qu’on appelle le ‘mariage mystique’. Malheureusement,
ce Dieu tout aimant ne trouve que de très rares personnes
qui acceptent de laisser les créatures et de se donner sans
réserve à Lui. Dans sa ‘Vive Flamme’, le grand Docteur Carme
dit, au sujet de Dieu habitant les âmes: «.en certaines
âmes il est seul, et en d'autres il n'est pas seul; en quelques-unes
il demeure de bon gré, et en d'autres il demeure de mauvais
gré; en quelques-unes il demeure comme en sa maison, gouvernant
et commandant tout, et dans les autres il est comme un étranger
dans la maison d'autrui, où il n'a nulle autorité pour rien
commander ni rien faire. L'âme où il y a moins d'appétits
et de goûts propres, est celle où Dieu demeure plus seul et
de meilleur gré, et davantage comme en sa propre maison, la
gouvernant et la régissant.» Faisons donc le ménage de
nos âmes, et pratiquons le détachement, afin d’offrir à Dieu
une demeure qui soit bel et bien sienne, où il demeurera de
bon gré. Implorons-le de prendre le contrôle de nos vies!
Malheur
à nous si nous refusions, ou même négligions, d’accepter la
demande en mariage de notre Dieu très aimant! Malheur à nous
si nous faisions obstacle à la grande œuvre de Notre Seigneur
en nous et à travers nous! Malheur à nous si, à cause de notre
paresse et de notre attachement aux créatures, nous ne laissions
pas le Christ adorer, remercier, demander, souffrir, aider,
à travers nous! Malheur à nous si nous n’apprenions pas à
reconnaître ce travail de Dieu dans et à travers les autres!
La plus grande souffrance au Purgatoire doit être de réaliser
que nous n’avons pas accompli notre merveilleuse destinée
d’union totale à Dieu… Mes chers amis, demandons à Notre Dame
de nous obtenir la grâce de garder ces vérités en notre esprit,
et d’agir en conséquence. Puissions-nous vivre de telle sorte
que nous redisions en toute vérité avec le grand Apôtre st
Paul: «je vis, mais non plus moi; car c’est le Christ qui
vit en moi.» (Gal. 2 20). ←
Quelques
nouvelles: 1-Comme la majorité d’entre vous le sait déjà, le Chapitre Général s'est bien déroulé, et S.E. Mgr Bernard Fellay
a été réélu Supérieur Général. Deux nouveaux Assistants Généraux
ont été élus: MM. Les abbés Alain Nély, et Nicklaus Pfluger.
L'abbé Jean Violette a quitté le Canada pour devenir Curé
de notre paroisse de Kansas City, Missouri. Nous le remercions
pour son zèle et son souci pastoral. Il a été remplacé par
m. l'abbé Arnaud Rostand, de France. Nous lui souhaitons ici
la bienvenue, et nous l'assurons de l'appui de tous les fidèles
Canadiens. 2-Nous félicitons m. l'abbé Dominic May,
de Calgary, qui a été ordonné prêtre en juin dernier, et qui
est maintenant en poste au Prieuré de Toronto. M. l'abbé Dominique
Boulet devient le Prieur de Shawinigan, Québec, et l'abbé
Loren Gerspacher retrouve sa Colombie-Britannique natale,
car il est maintenant Prieur de Vernon. Nous leur souhaitons
tous le meilleur. 3-Nos vocations Canadiennes en
formation: Pierre Roy (Écône, 2ème année);
Jonathan Prescott, Laurence G. Barrett, et Gary Moore (Tous:
Winona, 1ère année); Marc Potvin (Winona, Année
d’humanités).