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Communicantes: Mai 2001
 

Le Pape, la Messe et la Paix

Abbé Philippe Laguérie

Pacte No. 52, février 2001


Nos tractations avec Rome quittent le domaine du privé et du confidentiel et transpirent dans la grande presse. Tant mieux ! Nous n'avons rien à cacher et la transparence a toujours été notre fait. Les choses piétinaient depuis quelques semaines et pour que nos lecteurs comprennent, procédons avec ordre.

I – RAPPELS

C'est Rome qui a pris l'initiative, et Elle seule. Toute autre interprétation est historiquement fausse et conséquemment partisane. C'est à la faveur du pèlerinage de la Tradition à Rome (8 au 11 août 2000) que le cardinal Castrillon-Hoyos invite nos quatre évêques. Chargé par le pape de régler la situation d'Ecône, il reçoit Mgr Fellay (29 décembre) et lui fait rencontrer le pape (30 décembre). Il est alors muni des pleins pouvoirs et fait oralement les propositions les plus alléchantes : levée de l'excommunication, juridiction donnée aux évêques, reconnaissance de la FSSPX de droit pontifical, juridiction personnelle sur les fidèles...

Fort intelligemment nos supérieurs, sur la proposition du Père Riffan (Campos-Brésil) font savoir au cardinal Castrillon‑Hoyos qu'une négociation ne peut s'engager que sur deux conditions préalables : levée de « l'excommunication » et reconnaissance du droit imprescriptible de célébrer la messe traditionnelle pour tout prêtre catholique. La première proposition est assez banale et fait partie de la négociation elle‑même. La seconde est simplement géniale. Il ne s'agit pas en effet de régler la "question d'Ecône" qui n'a jamais existé et n'existe pas. Il s'agit de rendre à l'Eglise catholique le trésor de sa liturgie vénérable dont la privation violente fait, depuis 30 ans, les ravages que l'on sait. Tandis que Mgr Fellay met cela par écrit (21 février) le cardinal se garde de coucher quoi que ce soit par écrit. Il fait savoir que la proposition 1 ne pose aucune difficulté tandis que l'autre... n'est pas mûre.

Très sagement, Mgr Fellay décide d'attendre qu'elle mûrisse !  À ce stade, les négociations sont fort bien engagées. Nous demandons à Rome qu'elle signe simplement le document (1986) de la commission de neuf cardinaux réunis par le pape à cet effet. Deux questions avaient été posées : a) la messe traditionnelle a-t-elle été interdite ? b) Faut-il la libéraliser à toute l'Eglise ?

On sait que 8 cardinaux sur 9 avaient répondu Non à la première et Oui à la seconde, énumérant 6 conditions parfaitement acceptables de cette réintroduction officielle de la messe de toujours. Le pape était prêt de signer, nous dit le cardinal Stickler (qui nous révèle la chose en 1997 !). Hélas, il ne le fit point sur l'énorme pression des conférences épiscopales, la française surtout, on s'en doute. [nos lecteurs peuvent retrouver tout cela dans l'admirable conférence de M. l'abbé Aulagnier à Bordeaux, cassette à commander à Mascaret, 19 avenue de Gaulle, 33520 Bruges : 50 Francs]. [2]

Suit alors une période assez floue (15 février ‑ ler mars) où l'on substitue aux propositions concrètes des documents doctrinaux. (...).

II -NOUVEAUTÉS

En date du 25 février, le pape nomme quatre nouveaux cardinaux dans la commission Ecclesia Dei pour une base de dialogue élargie avec... la FSSPX. Patatras !

Ce grave changement de décor en dit très long. Ce n'est plus le pape seul et son chargé de mission ‑ au titre de sa charge de préfet de la congrégation pour le clergé ‑ qui va mener les tractations avec Ecône, mais la tristement célèbre commission Ecclesia Dei née de « l'excommunication » de Mgr Lefebvre et qui vient d'introduire dans la Fraternité Saint-Pierre la pomme de discorde qui devrait normalement la porter en terre !

On la renforce dans ce but ; la pièce clef est le cardinal Billé, primat des Gaules et président de la conférence épiscopale française. Les évêques français seront passés par là, avertissant Rome, comme en 1986, que rien ne se fera sans eux... Et qu'avec eux rien ne se fera... ! Les autres membres sont destinés à faire la sauce de ce poisson. Mais quelle sauce ! Le cardinal Ratzinger lui-même, flanqué de deux autres, Médina (liturgie) et Herrantz (droit canon).

Le pape a sans doute été fort bien intentionné au départ. Les comptes qu'il ne va pas devoir tarder de rendre à son créateur, la situation ingouvernable de l'Église que la présence traditionaliste adoucirait, l'ont poussé sincèrement, croyons-nous, à ce dialogue.

Mais qui veut la fin doit vouloir aussi les moyens. Or le refus de la messe de toujours pour tous et la capitulation devant les évêques français témoigne d'un gouvernement dépassé de toutes parts, dont le seul art consiste désormais à concilier et composer des forces chacune incontrôlables. Voilà le beau résultat de 30 ans d'usure d'un pouvoir fait pour la Foi et utilisé pour l'oecuménisme. On est toujours puni par là où l'on a péché !

On comprend qu'en date du 2 mars, Mgr Fellay fait savoir qu'il interrompt ces négociations bien engagées d'abord et très mal ficelées ensuite. Elles reprendront quand Rome aura signé la liberté de la messe catholique. N'est-ce pas le minimum qu'on puisse espérer et exiger ? On saura alors si le pape voulait vraiment la paix.  

Abbé Philippe Laguérie



[2] M. l’abbé Paul Aulagnier donne des précisions intéressantes dans son article publié dans le Bulletin du Prieuré Saint-Jean-Eudes, de mars 2001, no. 63 : « C’est le cardinal Stickler qui nous l’a révélé, en 1996, dans une interview aux USA, à la Latin Mass Sociey, interview rediffusée ces derniers mois par le C.I.E.L. M. Eric de Saventhem, alors président d’Una Voce, nous le confirmait en 1998 par la publication de sa correspondance avec Mgr Ré, aujourd’hui cardinal, dans le livre de La Nef : ‘Enquête sur la messe traditionnelle’ (p. 380-391).

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